Festival Que du feu 2024 encart

MY FREEDOM, YOUR FREEDOM

Un film de Diana Näcke

Deux portraits touchants pour une réflexion sur l’univers carcéral

À travers le portrait de deux femmes, Kübra et Salema, ce documentaire s’intéresse au milieu carcéral et à la difficulté de se réinsérer, une fois la liberté retrouvée…

À l’image de la scène d’ouverture de danse africaine derrière les barreaux, "My Freedom, Your Freedom" est un documentaire hybride, alternant moments de joie et épisodes plus douloureux, au cœur d’un poignant témoignage de vérité, évoluant au fil des humeurs de deux femmes : Kübra, 22 ans, qui connaît l’univers carcéral depuis son adolescence, et Salema, 41 ans, en proie à de nombreuses addictions. La caméra va alors suivre le parcours de ces deux femmes, de la prison à la liberté, celles-ci s’exprimant seule face à la caméra de manière récurrente. Les deux protagonistes se livrent alors librement, sans aucune langue de bois, décrivant aussi bien leurs crimes odieux que leurs craintes de replonger dans leur travers, ou la peur de ne pas être à la hauteur pour réussir une fois sorties. Ayant apprivoisé la prison, connaissant les codes de cet univers par cœur, c’est désormais le quotidien d’une vie ordinaire qui les effraient, ne pas réussir à prendre soin d’elles.

Par la confiance qui s’installe avec la réalisatrice, les deux jeunes femmes n’éludent aucun sujet, ce qui offre aux spectateurs des confessions émouvantes, celles-ci étant bien plus attendrissantes que terrifiantes malgré les crimes qu’elles ont pu commettre. En particulier, Salema, écorchée vive dont les craintes sont bien plus importantes, transmet une véritable émotion, le spectateur ne pouvant que ressentir de la compassion pour sa lutte contre ses addictions, d’autant plus lorsqu’elle nous livre, face à la caméra, son passé douloureux. Le documentaire suit également les femmes une fois les portes du pénitencier franchies, ce qui donne lieu à des scènes plutôt cocasses, en particulier lorsque la caméra est du côté de Kübra. Celle-ci, complètement détachée face à sa situation, multiplie les traits d’humour. La cinéaste a également décidé de s’intéresser à un gardien de la prison et au directeur, ce qui lui permet de s’interroger sur le rôle et l’efficacité de la répression carcérale dans nos sociétés modernes.

Néanmoins, les différentes scènes situées hors des murs de la prison perdent de leur sincérité, notamment parce qu’une étrange impression de mise en scène émerge. Même si on ne remet pas en cause la véracité des propos, certaines situations apparaissent difficilement réelles et spontanées. Si la caméra parvient à magnifier plusieurs séquences, comme lors de cette fête foraine où un sentiment de liberté transparaît de la pellicule, les ficelles apparentes finissent par gâcher notre plaisir. Toutefois, à travers ce portrait poignant de deux femmes, la réalisatrice livre un documentaire bouleversant et un constat saisissant des prisons, nous poussant à réfléchir sur les chances offertes aux bagnards pour s’en sortir.

Christophe BrangéEnvoyer un message au rédacteur

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