MIDNIGHT RUNNER
Aider et se laisser aider
Alors qu’ils ont été séparés de leurs parents biologiques à l’âge de 4 ans, l’un parlant à peine, l’autre pouvant tout juste marcher, Jonas et Philipp avaient peu de chance de devenir des adultes accomplis. Ce fut pourtant le cas pour Jonas, coureur de fond performant visant les jeux olympiques, employé dans un restaurant, et dont la vie de couple semble équilibrée. Et pourtant le souvenir de Philipp, disparu un an plus tôt, est toujours bien présent…
Les voies de l’esprit humain sont multiples et chacun gère à manière ses traumatismes. "Midnight Runner" tente ainsi de capturer ce qui crée chez Jonas, son personnage principal, un déséquilibre, le poussant un soir, alors qu’il tente d’aider une femme qui vient de trébucher, à voler le sac de celle-ci, prenant ensuite la fuite en courant. Un sentiment de culpabilité lié à la mort de son frère ? Une peur de ne pas être assez performant ou de ne pas être reconnu à sa juste valeur ? Une inquiétude quant à la réalité d’une complicité avec sa compagne, ou à l’avenir de leur relation ?
Nous entraînant, grâce à un montage habile aux glissements imperceptibles, dans quelques uns des cauchemars du héros, la mise en scène de Hannes Baumgartner ne donne que des clés partielles, faites de personnages existants, de souvenirs épars et de sujets perturbants, suggérant un homme qui perd pied et générant la tension qui va avec. Par son visage souvent impénétrable et un regard derrière lequel on devine l’intensité soudaine de la pulsion, Max Hubacher (acteur suisse-allemand découvert dans "Mario" l’an dernier) compose un personnage énigmatique qui refuse toute aide extérieure. Et c’est peut être là le sujet du film, la capacité d’aider l’autre, l’acceptation de n’avoir pas su, et la propension à se laisser soi-même aider. Une mise sous tension intime que le réalisateur parvient à toucher du doigt.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur