MAYDAY
Une parabole saisissante
Lors d’une réception, Ana, serveuse, se retrouve à assister la mariée, qui lui demande de l’aide, en pleurs. Dans le local où est entreposé un cygne de glace, elle se retrouve coincée par homme pénètre, qui en ressort l’air satisfait. Alors que les plombs sautent, Ana s’enfuit et se retrouve sur un rivage, recueillie par de mystérieuses femmes-soldats qui souhaitent l’enrôler…
"Mayday" est sans nul doute un film féministe, mais pas jusqu’au-boutiste. Au travers de paraboles multiples, il nous propose de plonger dans un monde où seules les femmes règnent, se protégeant les unes les autres, condamnant les hommes qui passent par là, tout en donnant à son héroïne, une certaine capacité ou volonté d’en sortir et donc de reprendre une vie normale. Évoquant initialement de manière elliptique, par un plan fixe s’attardant sur un couloir, une potentielle agression sexuelle d’Ana, puis offrant une parabole sur son changement d’état psychologique (certains verront même dans la figure de l’entrée dans le four, une forme de suicide…), en la plongeant dans l’océan et dans un autre monde, fait de combativité, d’entraide et de protection entre femmes.
Représenté à l’inverse d’un cauchemar, par une lumière estivale et des criques ensoleillées, cet univers inclut lui aussi une autre parabole : celle des sirènes, les femmes envoyant elles-mêmes un mystérieux message de détresse, pour mieux attirer les hommes et les noyer. Les messages cryptiques qui jalonnent les dialogues, viennent conforter l’hypothèse d’un état « autre » allant au-delà de la prise de conscience sur la situation de la femme (« tu as été dans une guerre toute ta vie, tu ne te souviens plus »). Ainsi "Mayday" semble pouvoir se lire à plusieurs niveaux, de volonté de d’une inversion de la domination (le moment dansé où elles mènent une troupe de soldats « par la cravate »…) à la reprise de souffle final, en passant par l’apparition d’un rideau rouge, symbole récurrent au cinéma d’un état de rêve ou de stupeur (voir notamment les films ou séries de David Lynch). Si la forme en déroutera peut-être certains, l’immersion dans l’univers de la réalisatrice Karen Cinorre, vaut en tous cas le détour.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur