MATTHIAS ET MAXIME
Une grosse déception
Matthias et Maxime sont amis depuis l’enfance. L’un est homo, l’autre hétéro. Pour les besoins d’un court métrage, réalisé par la sœur de Maxime, Matthias ayant perdu un pari, ils vont devoir s’embrasser devant la caméra. Mais ce geste ne sera pas sans conséquences, installant un doute, bouleversant peu à peu leurs existences…
Film très attendu du dernier Festival de Cannes,, le nouveau Xavier Dolan, déjà récipiendaire du Prix du jury ("Mommy") et du Grand Prix ("Juste la fin du monde"), est loin d'avoir séduit les festivaliers. Partant d'un baiser échangé pour les besoins d'un court métrage, entre deux garçons, amis depuis l'enfance, le scénario tente de dessiner en creux les conséquences de cet acte commandé, à la fois sur leur relation et sur leurs proches. Ajoutant comme enjeu le compte à rebours du départ programmé de l’un d’eux pour l’Australie, celui-ci s’enlise progressivement dans l’affichage d’une gêne, doublé d’une profonde souffrance.
Si la décision de ne jamais montrer à l’écran le fameux baiser, le tournage faisant l’objet d’une ellipse et la caméra s’attardant sur celui qui détourne le regard lors du visionnage chez les parents de Maxime, est plutôt bienvenue, tout le film semble éluder le vrai enjeu de l'histoire : à savoir l'explication que doivent avoir les protagonistes suite à ce geste. Traitant certes de la fuite face à ce qui peut bouleverser nos existences, le scénario se garde finalement de traiter réellement son sujet, préférant s'attarder une nouvelle fois sur les tensions entre le personnage que joue Dolan lui-même et une mère alcoolique sous tutelle.
Heureusement, le style percutant du réalisateur québecois prend par moment le dessus, lors par exemple de la soirée d’adieux, filmée en accéléré, ou au moment où le personnage de Maxime s’imagine sans tâche de vin au visage, face à un miroir. L’utilisation des chansons et musiques est aussi particulièrement pertinente et dynamise un récit souvent englué dans le pathos, de « Always on my mind » des Pet Shop Boys, à « J’ai cherché » d’Amir, en passant par un beau morceau de piano lors d’une scène nocturne. Mais au final, la traduction des hésitations de chacun ne fonctionne pas réellement, comme lorsque le personnage fait marche arrière, accompagné « d’un effet de vent » des plus ratés. Et la concordance de l’orage avec la scène cruciale du film, achève de le faire basculer dans le mélodrame, malgré une fin plutôt ouverture. Une grosse déception donc, pour un sujet qu’on aurait aimé voir abordé de manière plus frontale.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur