MAMAN A TORT
Un portrait bien trop naïf d’une gamine qui découvre que « le monde, il est méchant »
Comme dans Copacabana, Marc Fitoussi s’intéresse une nouvelle fois aux relations mère/fille. Ici, il est question de la jeune Anouk à l’aube de ses quatorze ans. Comme tous les élèves de troisième, elle doit faire un stage d’observation. Initialement prévu au sein d’une émission de télévision, elle se retrouve finalement dans la compagnie d’assurance dans laquelle sa mère est employée depuis bientôt quinze ans. Évidemment, c’est en traînant les pieds que la jeune fille va se rendre chez La Serenita (au nom grandement ironique vu l’ambiance de travail), mais cette semaine sera surtout l’occasion pour elle de se confronter à une réalité qu’elle n’imaginait pas, de quitter sa bulle d’enfant privilégiée pour découvrir les nuances entre le Bien et le Mal.
Malheureusement, le scénario caricatural et le manque de subtilité de l’ensemble condamnent le film à être une pseudo-comédie dramatique, jamais véritablement drôle, rarement touchante et très insignifiante. Pourtant, les comédiens ne sont pas à blâmer, en particulier la jeune Jeanne Jestin, incroyable de justesse et d’intensité pour son âge, mais les rebondissements attendus et la crédulité du propos rendaient quasi-impossibles l’élévation de l’intrigue au-delà du discours de comptoir. En décidant de critiquer l’absence de morale des entreprises capitalistiques par le biais du regard d’un enfant, Marc Fitoussi avait opté pour une approche originale dont le procédé était particulièrement intéressant (la vérité ne sort-elle pas de la bouche des enfants selon le bon vieil adage ?). Mais cela n’impliquait pas d’inclure son récit dans une telle forme de naïveté où l’on ne compte plus les stéréotypes faussement décriés.
Car le métrage ne fait qu’effleurer ses nombreux sujets, en particulier le harcèlement au travail, la valorisation des diplômes dans notre système, ou la perte d’humanisme inhérente à certaines fonctions. En voulant mêler la chronique familiale à une analyse sociétale, le cinéaste commet l’écueil de délaisser l’âme de son film (cette relation maternelle très bien retranscrite) au profit de balbutiements pamphlétaires sans fougue. Au final, le message de "Maman a tort" s’en retrouve grandement annihilé, d’autant plus lorsque le rythme nonchalant et une mise en scène mécanique (trop de plans resserrés pour signifier l’enferment des personnages, une personnification des messages écrits très peu esthétique) viennent assombrir le tableau. Si le film a le mérite de mettre dans la lumière la prometteuse Jeanne Jestin, il est également l’œuvre la moins approfondie et travaillée de son auteur.
Christophe BrangéEnvoyer un message au rédacteur