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LIMBO

Un film de Ben Sharrock

Quand l’ambiance sert de fond et de forme

Sur une île au large de l’Écosse, une poignée de réfugiés de toutes nationalités attendent des nouvelles de leurs demandes d’asiles respectives. Omar, venu de Syrie, parcourt ce paysage brumeux peuplé d’autochtones méfiants accompagné de son oud, instrument de musique à cordes pincées, un cadeau de son grand-père dont il ne se sépare jamais…

Limbo film movie

Une île qui ressemble à une prison de pluie, style île déserte, le brouillard à la place du soleil. Une lande cabossée que traversent des petits chemins de terre nus. Au milieu : une cabine téléphonique. Plus étonnant encore : une cabine téléphonique utilisée, lieu de rassemblement des demandeurs d’asile retenus sur cette île Écossaise au large de tout, seul endroit où chacun peut enfin communiquer avec sa famille restée là-bas, au pays. Une situation loufoque teintée d’une certaine tristesse, comme le démontre cet homme qui s’écroule en pleurs à la fin de son appel : un moment doux amer comme il y en aura tant d’autre dans "Limbo". L’ambiance, ici, sert à la fois le fond et la forme de ce film d’une rare justesse, où l’humain prend le pas sur le personnage.

"Limbo" suit ainsi un petit groupe d’hommes demandeurs d’asile échoués sur cette île comme des poissons hors de l’eau et qui attendent, dans un état qui oscille entre l’ennui et l’asphyxie, qu’on veuille bien décider de leur sort. Notre personnage principal est Omar, un jeune Syrien joueur d’oud que ne quitte jamais son instrument fétiche. C’est lui que suivra la caméra attentive du réalisateur écossais Ben Sharrock, dont c’est le deuxième long-métrage après "Pikadero". Mais c’est son regard et ce qu’il suscite chez les habitants de l’île que nous suivrons en tant que spectateur. Loin des clichés sur l’amitié fraternelle entre les peuples ou sur un racisme frontal, "Limbo" est un film tout en nuances, qui semble souvent hésiter entre réalisme et absurdité, une frontière assez fragile quand l’administratif vient se heurter à la gravité de la vie. Un sentiment que vient renforcer une mise en scène aux plans composés comme des tableaux, dans un format 4:3 adapté à son style comme au côté étriqué de cet étrange microcosme.

Et dans tout ce brouillard, dans toute cette absurde attente, ces paysages tristement beaux sur lesquels les éléments semblent se déchaîner pour rien si ce n’est tromper l’ennui, une question suspendue demeure : entendrons-nous Omar jouer de son oud ? Ben Sharrock nous fera-t-il ce cadeau ? Suspense…

Amande DionneEnvoyer un message au rédacteur

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