LIBORIO
Un désir d’indépendance réprimé
Oliborio Mateo, alias Liborio, se perd dans la forêt lors de l’ouragan de 1908, en République Dominicaine. Retrouvé presque mort, il deviendra par la suite une figure réputée, suivie par de nombreux fidèles, prônant une religion dérivée du Christianisme et de rituels païens…
Oliborio Mateo, surnommé Liborio, ou Papá Liborio, est une fugure de République Dominicaine, à la fois synonyme de rébellion, et d'indépendance culturelle et religieuse. C'est autour de cet homme, né en 1874 à San Juan de la Maguana, et décédé le 27 juin 1922, que Nino Martínez Sosa construit son premier long métrage, présenté dans la Tiger compétition du Festival de Rotterdam 2021. Une scène de tempête, en forêt, où l'homme trouve refuge dans une grotte, croisant une mystérieuse chèvre, ouvre le film. Récupéré ensuite par des villageois, tel un survivant revenu d'entre les morts, on lui prêtera par la suite des pouvoirs de guérisseur et il fédérera autour de lui toute une communauté, l'appelant à vivre à part, sur des terres choisies.
En sept chapitres, l'auteur dépeint l'influence de ce leader imposant, interprété avec conviction par Vicente Santos, s'attachant tour à tour à ses aspects de gourou, sa renommée grandissante auprès des riches propriétaire, ou l'inquiétude provoquée chez les envahisseurs américains. Mais par le biais des regard de six autres personnages, c'est aussi son grandissant détachement du monde qui est mis en évidence, et les différences de modes de vie entre Dominicains et étrangers. La représentation de la nature est d'ailleurs pleine de contraste lors du chapitre s'intéressant au militaire en chef, montrant d'un côté moultes détails (champignons, poissons, insectes...), alors que de l'autre la moustiquaire s'impose comme une limite affirmée.
Surnommé le « brujo » (le sorcier) ou le maître, voire le Saint, c'est finalement une histoire de harcèlement d'une religion dissidente qui se fait jour peu à peu. Étalé sur près de 8 ans (entre 1908 et 1916), le récit permet d'aborder les inégalités de richesse et les questions de propriété terrienne, tout en amenant progressivement l'idée d'une immortalité de cette figure légendaire. Une idée qui culmine dans le dernier plan, saisissant, mettant en scène le fils du personnage central.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur