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LEUR MORALE... ET LA NÔTRE

Un film de Florence Quentin

Fait ce que je dit et pas ce que je fais...

La « famille satisfait ou remboursé » squatte la caisse des supermarché pendant des heures histoire de profiter d’un maximum de coupons de réductions. Sans gêne, ils sont pourtant les premier à râler sans arrêt en jugeant l’attitude des autres. Revendant les produits qu’ils se font rembourser, ils vont même parfois jusqu’à changer les dates limites de consommation. Jusqu’au jour où cette méthode douteuse entraîne l’intoxication d’une voisine… Commence alors un nouveau parcours du combattant, pour effacer toutes traces de leur méfait…

« Elle est belle la France » ! C'est avec ce constat en tête que l'on pourrait sortir de la salle après la projection de « Leur morale et la notre », dans lequel se font railler les radins, les délateurs et autres racistes. S'il est vrai que les français sont des râleurs, on le savait déjà. S'il sont paraît-il souvent considérés comme les touristes les plus désagréables, ça n'est pas très étonnant non plus. S'ils utilisent des coupons de réductions pour réduire leurs dépensent ou se font rembourser un produit sur deux, on se dit cependant qu'il n'y a rien de honteux là dedans, étant donné le prix de la vie au quotidien et la faiblesse des salaires qui tend à s'étendre de plus en plus, sous prétexte qu'il faudrait supprimer les prétendus « privilèges » des uns ou des autres. Tirons donc tout le monde vers le bas au lieu de vers le haut... et nous irons sûrement dans le bon sens !

Florence Quentin, ex-coscénariste d'Etienne Chatiliez (« La vie est un long fleuve tranquille », « Tatie Danielle »), pour ne pas stigmatiser une frange de la population, en vient naturellement (et malheureusement) à grossir le trait. Il y a plus de dix ans, elle épinglait avec délices les travers des familles ou individus, aujourd'hui, elle dépeint de manière moins drôle, mais cela est peut-être inhérent au sujet lui-même, des réacs classiques, qui ne vivent pas dans une société dont ils ont peur, ou dont ils se servent, et observent le monde au travers du journal, qu'ils ne veulent plus lire. Pour eux, « il y a plus de morale ». Ou il n'y a que des avantages, chez les autres, bien entendu: « il y a que les fonctionnaires qui partent en vacances ». Le symptome du Moi-je n'est pas loin. Moi je travaille (sous entendu pas les autres). Moi je suis honnête (sous entendu faites ce que je dis, pas ce que je fais). Ne serait-on pas en train de nous décrire une certaine France qui vote Front nationale, plus par simple jalousie de ce que peut avoir ou faire le voisin que par idéologie. Le choix de la Côte d'azur pour situer une partie de l'action n'est d'ailleurs certainement pas anodin.

Le virage que prend le scénario (attention spoiler) prend avec la mort de la voisine, l'espérance hypocrite d'un héritage apporte une surprise qui aurait pu faire rebondir un film en manque de souffle : l'héritier est arabe... Le film bascule alors dans le récit d'espionnage peu convaincant, avec affrontements tactiques entre voisins, le ton étant plus au grand-guignol qu'au véritable cynisme. Tout est exagération dans cette deuxième partie, de la paranoïa globale d'Abril, à la suspicion de collusion entre voisin et notaire, qu'ils découvrent d'origine tunisienne, jusqu'aux analyses scientifiques du contenu des poubelles... ... Bref, ça cabotine un maximum. Restent cependant quelques bonnes trouvailles qui feront sourire ou donneront des idées, comme l'esclavage des bénévoles de la croix rouge, qui plient vos courses ou poussent les caddies pour la beauté du geste, ou l'usurpation du nom de l'Abbé Pierre (association « les amis de l'abbé Pierre ») pour assurer son petit trafic.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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