LETTRES ET REVOLUTIONS
Carnets d'exils
Tout commence autour d'une mort mystérieuse. Celso Afonso Gay de Castro entre par effraction, de nuit, dans un appartement. Il n'en sortira jamais vivant. Abattu par la police, suicidé se sachant cerné, l'enquête officielle ne retiendra que la seconde théorie, alors que certains clament la première. Il en est de même pour ses intentions. Si la police n'a toujours retenu que la thèse du simple cambriolage, qu'en est-il des pistes indiquant que l'homme vivant dans cet appartement était un ancien officier Nazi ? C'est de cette événement que découle le film de Flavia Castro. Comme le dira simplement et humainement son frère, ce ne sont pas tant les luttes révolutionnaires qui l'intéressent mais la réponse a une simple question. Qu'est-ce qui, une nuit, a pu pousser un homme de 41 ans à rentrer dans un appartement, l'arme à la main, et à y trouver la mort. Le film est donc dès le départ une quête personnelle et familiale.
Du Brésil à l'Argentine en passant par Paris, Flavia Castro retrace l'histoire d'un personnage et d'une famille. Témoins actifs de l'évolution d'une partie du globe et d'événements historiques, tel Forrest Gump, la famille Castro va vivre son histoire en parallèle de l'évolution de masses. C'est en enquêtant auprès de ces acteurs de la révolution ayant côtoyé son père que Flavia va raconter à la fois son histoire et indirectement celle de son pays. C'est donc en comptant une histoire que Flavia va raconter l'Histoire.
Avec une réalisation et un montage ingénieux, habile, intelligent et impliqué, Flavia Castro va nous faire adhérer dès les premières images, allant même jusqu'à briser le cadre par des interventions personnelles alors qu'elle interroge des témoins de l'époque, dont beaucoup de membres de sa famille (principalement sa mère, ancienne activiste, et son frère). C'est là la force du film : une force égale à sa faiblesse. Avec un parti pris affiché logique, il faut avouer que, malgré le tragique du drame familial, on ne porte que peu d'intérêt à cet illustre inconnu. Les théories de sa fille ne prévalent pas sur celle de la police, même si il est difficile d'adhérer à ces dernières, la citation "qu'est ce qui a pu pousser un homme de 41 ans à rentrer dans un appartement l'arme à la main" vampirise petit a petit le métrage. Si le fait d'enquêter, de tourner et de monter ce film a pu en quelque sorte aider cette famille à exorciser ses démons et agir comme une thérapie sur leurs doutes, force est d'avouer que l'on perd un peu d'intérêt du au manque de connections avec ce personnage inconnu.
Ce qu'il faut retenir de "Lettres et révolutions" c'est, en plus de son écriture exemplaire, la peinture indirecte d'une époque révolue. Celle des idées et des rêves révolutionnaires sud-américains ayant sombrés dans l'oubli, tout comme le père en question, devenu une sorte de mcguffin historique.
François ReyEnvoyer un message au rédacteur