LES VOISINS DE MES VOISINS SONT MES VOISINS
Un conte moderne, foisonnant et drôle
Employé dans un cirque, un magicien réalise un tour visant à découper une femme en deux… mais à l’issue de celui-ci les jambes ne sont plus dans les boite et le voilà qui doit chercher un nouveau job. Un randonneur sur le départ se retrouve coincé dans l’ascenseur de l’immeuble, car l’un des voisins s’est électrocuté dans sa salle de bain. Les autres s’affairent autour de lui, certains tentant de l’aider, d’autres non…
"Les voisins de mes voisins sont mes voisins" est sans doute l’un des longs métrages d’animation les plus stimulants de ces dernières années. D’abord parce que le parti pris graphique allie images réelles (fixes ou mouvantes, telles des photos pour décors, une dînette de poupées, des miniatures pour le public du cirque, ou un vrai chien qui pisse…) et des éléments déssinés ou articulés, voire même en images de synthèse (pour les clients du supermarché par exemple), créant ainsi un monde curieux, foisonnant, semblant fait de bric et de broc, qui colle parfaitement à l’humour absurde qui domine cette histoire de voisinage.
Après une intro située au cirque, marquant l’échappée d’une paire de jambes et le spleen d’un magicien ayant raté son tour, les réalisateurs font progressivement entrer en scène les différents habitants d’un immeuble, dessinant des liens de méfiance, d’indifférence ou de confiance (parfois aveugle). On trouve ainsi un randonneur encombré de ses équipements et désespérément à la recherche d’aide pour sortir de l’ascenseur bloqué, une mère danseuse de flamenco et ses deux enfants, un ogre moustachu qui chasse les petites filles, une gardienne serviable au fort accent, ou un vieux monsieur réservé… Tout ce beau monde va donc interagir dans une sorte d’urgence quotidienne étrange, chacun vacant à ses occupations et pourtant perturbé par les jambes vagabondes ou le jeune coincé dans l’ascenseur.
Et le décalage avec la réalité, instauré dès le début, va être savamment maintenu au fil d’un récit rythmé, l’animation permettant de disposer d’un chien qui parle et pense, d’une niche pop-up, de passages improbables en caméra subjective, d’un magicien devenu boucher qui tente d’avaler ses couteaux avant de devenir chauffeur, métier qui le projettera dans une actualité bien connue des spectateurs. La réalité est ainsi tordue en permanence, par petits touches (la recherche d’un nouveau job se fait via Paul-emploi, l’ascenseur se substitue au voyage prévu en permettant de camper ou de faire des barbecues, le minuteur fait des siennes à la cave, l’ogre se casse toutes les dents…). Toujours sur le fil du rasoir, le scénario, aux allures de conte moderne, évoque ainsi avec un humour noir assumé, des attitudes humaines plus ou moins sombres.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur