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LES COURAGEUX

Un film de Jasmin Gordon

« Même si on triche, on ne peut pas gagner »

Jule vit avec ses trois enfants, une fille adolescente et deux garçons plus jeunes. Les laissant tous les trois pour cinq minutes dans une cafétéria à côté d’un centre commercial, celle-ci ne réapparaît pas. Face à une serveuse qui menace d’appeler la police, les trois enfants s’enfuient, se cachent derrière la voiture de la mère, avant de décider de rentrer à pieds. Le soir, Jule réapparaît, soulagée de les trouver dans l’appartement. Racontant le lendemain à sa fille une histoire peu claire, elle, qui a déjà 4 mois de retard de payement du loyer, décide de ne pas les emmener à l’école mais de leur faire voir la maison qu’elle espère acheter…

Pas facile pour "Les Courageux", de passer après les films des Dardenne, de Ken Loach ou encore de Ursula Meier. Pas facile non plus pour Ophelia Kolb de passer après les prestations d'Emilie Dequenne dans "Rosetta", Laure Calamy dans "A Plein Temps" ou Lea Seydoux dans "L’Enfant d’en haut". Pourtant l’histoire contée ici tient globalement la route (même si la fin semble un peu « facile ») et l’interprétation d’Ophelia Kolb (l’inspectrice du fisc dans la série "Dix Pour Cent", également vue en bergère dans "La Petite Histoire de France", et récemment dans "Toi non plus tu n'as rien vu") est plutôt impressionnante, égalant sans problème ses prédécesseures. Cependant les influences semblent trop lisibles, dans la structure de ce premier long métrage, comme dans la manière quasi documentaire de filmer l’urgence. Et l’impression de redite s’impose bien vite.

Le scénario est cela-dit construit avec intelligence, laissant planer au départ un peu de mystère sur les agissements de cette mère, en apparence indigne. Cruellement, il marie les contraintes de sa situation (une liberté sous contrôle, une menace d’éviction...), avec son unique rêve d’acheter enfin un pavillon qu’elle fait visiter en douce à ses enfants, connaissant le code du boîtier à clefs. Détaillant la spirale de mensonges dans laquelle celle-ci semble acculée, le film est aussi une dénonciation en règle d’un système où, comme le dit le personnage, « même en trichant on ne peut pas gagner ». Seuls quelques moments de joie (une baignade au lac, portée par une musique dynamique, un radar que l’on macule collectivement de boue...) viennent alléger ponctuellement une tonalité particulièrement désespérée, laissant au spectateur un peu de répit, mais permettant de poser en même temps l’aspect inéluctable de la fin.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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