LE VENT DE LA LIBERTÉ
Un envol en montgolfière jusqu'au 7e art
Les familles Strelzyk et Wetzel ont le projet audacieux de s’enfuir de la RDA, en passant à l’ouest avec une montgolfière faite maison. Mais leur dernière tentative, qui a échoué, a attiré l’attention de la Stasi. Et le lieutenant-colonel Seidel est bien décidé à les retrouver avant leur nouvelle tentative…
Tiré d’une histoire vraie, "Le vent de la liberté" revient sur cette histoire insolite de la fin des années 70, qui a vu une famille est-allemande passer en RFA à l’aide d’une montgolfière dont ils ont eux-mêmes cousu le ballon. Michael Herbig nous livre donc un film d’évasion particulièrement efficace et très bien narré. On retiendra notamment l’idée de débuter le film par un échec, le film nous mettant donc directement face au caractère très fragile de l’opération, et au fait que les deux familles devront affronter de nombreux obstacles sur leur route vers l’ouest.
Ceci dit, si les faits en eux-mêmes et les péripéties sont particulièrement prenantes, Michael Herbig s’attarde également aux personnages, et c’est bien ce qui magnifie l’histoire. Car il ne se contente pas de l’objectif « passer à l’ouest » comme point commun, il les caractérise chacun par leurs enjeux et dilemmes propres, rendant le tout particulièrement humain dans un contexte de Guerre Froide. Les faits sont ainsi vécus de manière différente, selon le point de vue de chaque membre de la famille. Et cela augmente encore plus la capacité d’identification du spectateur à tel ou tel personnage et donc l’immersion dans le film. Ceci d’autant plus que les acteurs sont tous plus convaincants les uns que les autres.
Et s’il y a bien un point fort dans ce film, c’est bien son caractère immersif. Chaque millimètre de celluloïd respire les années 70 et la Guerre Froide. En particulier les costumes et les décors, qui nous plongent directement dans l’Allemagne de l’est, ceci dès le début du film. La réalisation n’est pas en reste, puisqu’elle aussi nous immerge de manière très efficace dans cette époque. Notamment dans l’esprit de psychose qui grignote petit à petit l’esprit des protagonistes, du fait d’un sentiment de persécution constant (on ne sait jamais à qui l’on peut se fier). Tout cela passe au travers de plusieurs mécaniques, comme les jeux de regard entre autres, mais également le recours à la demi-bonnette, procédé qui permet la mise au point à plusieurs distances. Celui-ci est utilisé ici pour nous montrer que peu importe la distance, on est toujours surveillé.
On retrouve également d’autres fulgurances de mise en scène très bien pensées et travaillées, comme par exemple le plan séquence lors du premier vol, au cours duquel la caméra s’attarde sur la réaction de chacun des passagers présents dans la nacelle de la montgolfière, afin que le spectateur puisse vivre en temps réel leur désarroi. Autre magnifique plan, lourd de sens, dont le film regorge, celui réunissant, via un reflet sur une fenêtre, le petit Fitscher et Berlin ouest, qu’il regarde avec admiration, nous faisant donc ressentir ce côté à la fois très proche (les deux sont de le même plan) et très lointain (du fait de la perspective).
Enfin, le montage est lui aussi très travaillé et efficace, que ce soit par son absence (comme lors du plan séquence donc) ou par la multiplicité des points de vue et la simultanéité des actions qu’il apporte. Il procure une montée de tension et d’adrénaline au spectateur, comme si le lieutenant-colonel Seidel n’était littéralement qu’à un cut de les arrêter. Le film jouera d’ailleurs plusieurs fois avec cet aspect du montage.
En définitive, "Le vent de la liberté" est un excellent film, qu’il faut absolument aller voir. Il nous rappelle que ce n’est pas forcément une bonne chose d’avoir un mur entre voisins, tout en restant toujours à hauteur humaine à travers les personnages, bien que leur outil premier soit une montgolfière.
Ray LamajEnvoyer un message au rédacteur