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LE TORRENT

Un film de Anne Le Ny

S’en sortir à tout prix

La jeune Lison attend les résultats de son examen permis de conduire. Passant rapidement récupérer ses affaires chez sa mère, elle se dirige pour le week-end vers la maison de son père, Alexandre, qui réside dans une belle villa dans les hauteurs, au-dessus de Gérardmer, dans les Vosges. Mais à peine arrivée, celui-ci s’éclipse avec sa nouvelle épouse, Juliette, pour une soirée théâtre à Épinal, la laissant jouer les baby-sitter avec son jeune demi-frère, Darius. Celui-ci couché, elle se met à fouiller dans les affaires de Juliette, essayant une de ses robes et ses chaussures. Mais une clé USB tombe de la paire de chaussures qu’elle a choisi et Lison ne peut s’empêcher de regarder ce qu’elle contient, découvrant ainsi une vidéo érotique de celle-ci avec un homme plus jeune. Alors que son père et sa femme rentrent, elle se précipite dans le dressing pour se changer, mais oublie la clé USB sur l’ordinateur…

Le Torrent film movie

Le nouveau film d'Anne Le Ny, actrice devenue réalisatrice ("Ceux qui restent", "Cornouaille", "On a failli être amies") est un polar ancré dans une sombre ambiance automnale, au cœur de la forêt Vosgienne, à proximité de la petite ville industrielle de Gérardmer, connue pour son linge de maison (en lin...) et son Festival du film fantastique. On pense de ce point de vue immédiatement aux "Rivières pourpres" de Mathieu Kassovitz, même si ici la réalisatrice joue ici l'équilibre avec les scènes dans cette grande maison moderne, synonyme de la réussite que va chercher à protéger Alexandre, qui travaille dans la construction bois. Découvrant l'infidélité de sa femme, avec laquelle il a alors une dispute, il tentera de la récupérer alors qu'elle est partie le long de la route en contrebas, mais ne pourra empêcher sa chute dans un ravin. Mais alors qu'il est sur le point d'aller se dénoncer, le corps ayant disparu, emporté par le torrent en crue durant une nuit de tempête, cet événement climatique apparaît comme une aubaine, lui évitant des explications et une potentielle suspicion de meurtre.

Et nous voici au cœur du sujet du film : le mensonge, ses raisons et ses conséquences. Tout le scénario d'Anne Le Ny tourne finalement avec une certaine habilité autour de cette question et du personnage pivot de la fille, Lison, embarquée dans ce mensonge sans connaître la vérité, et par amour et peur pour son père. De ce point de vue, le choix de la jeune actrice Capucine Valmary s'avère particulièrement judicieux, dans ce mélange d'innocence et de désarroi, dont semblent profiter à la fois les personnages de José Garcia (le père, manipulateur inconscient) et d'André Dussollier (le père de la belle-mère, observateur réfléchi). Si l'on voit venir un peu trop facilement l'élément qui constituera la faille de cette façade familiale trop rapidement construite, l'engrenage est efficace. Quant aux lieux, ils sont exploités avec intelligence par la réalisatrice, ceci dès la première séquence, où la caméra remonte un torrent jusqu'à une chaussure de femme flottant et tournant en rond le long de rochers. Comme un symbole de persistance du corps de cette victime, qui finira bien par réapparaître et par « parler ». Et s'il est exagéré de parler de « personnage du film » pour la maison, c’est surtout le personnage de l'amant qui apparaît finalement comme sous exploité. Reste un polar honnête, au sujet qui questionne la puissance des liens familiaux.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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