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LE THÉORÈME DE MARGUERITE

Un film de Anna Novion

L’échec comme une leçon

Marguerite, 25 ans, fait une thèse en mathématiques à l’ENS, chapeautée par le professeur Werner. Alors que ce dernier a accepté de diriger également la thèse de Lucas, étudiant d’Oxford, travaillant sur le même théorème qu’elle, celle-ci subit un échec lors d’une présentation, Lucas mettant en avant une erreur qu’elle n’avait pas repérée. Décidant de démissionner, elle cache la situation à sa mère et se retrouve en colocation dans le quartier chinois de Paris, avec une jeune femme qu’elle a croisé dans une formation d’un institut de sondage…

Le Théorème de Marguerite film movie

Surtout ne vous découragez pas à la vue du titre de cette comédie dramatique, car Anna Novion a réussi contre toute attente à rendre non seulement son héroïne (une thésarde à la limite de l’autisme) attachante, mais aussi à faire des mathématiques un ressort dramatique et un fil romantique entre deux êtres résolument opposés dans leurs caractères. Les spectateurs de Cannes et d’Angoulême, qui ont fait un triomphe au film, ne s’y sont pas trompés : ils ont repéré là une jeune actrice hors pairs en la personne d'Ella Rumpf (vue dans "Zone(s) de turbulence" et "Grave", parfaite dans son mélange de curiosité, d’inquiétude, et aussi renfrognée que compétitive), et une metteuse en scène, Anna Novion ("Les Grandes Personnes") encore trop rarement derrière la caméra.

Récit initiatique qui pose l’échec comme une nécessaire leçon de vie, "Le Théorème de Marguerite" parvient à tenir en haleine, en se concentrant sur l’attitude au départ défaitiste de son héroïne, thésarde blessée par son incapacité à voir sa propre erreur, et obligée de se confronter au monde réel. En colocation, vendant des chaussures (avant de se mettre à une autre « activité » moins classique), elle ment à sa mère, laissant derrière elle son confortable mais ultra-compétitif milieu universitaire. Anna Novion tâche de traduire ses émotions, caméra tremblante et flou pour signifier son malaise, effets de passage dans un tunnel alors qu’elle est perturbée, et en fait une jeune femme capable progressivement de prendre le contrôle et de s’inscrire malgré tout dans l’air du temps des comportements amoureux.

Parvenant, dans la dernière partie du film à suggérer le caractère obsédant et donc partiellement auto-destructeur des recherches menées, qui ne quittent jamais l’esprit de son personnage (à l’image des formules mouvantes qu’on nous donne aussi à voir), elle positionne finalement son film, bien au delà du pâlot "Un Homme d'exception" de Ron Howard, avec Russel Crowe, ou de "Un espion ordinaire" avec Benedict Cumberbatch, en maintenant sur la durée un ton de comédie. Une vraie réussite, qui pourrait trouver un public assez large.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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