LE MONDE D'APRÈS
Cynisme, quand tu nous tiens
Un soir de janvier 2022 à Paris, autour d’un immeuble, des résidents et visiteurs se croisent, interagissent, dans l’ambiance névrosée du moment, épidémie de Covid 19 oblige…
Né sans doute d’un raz le bol des excès de paranoïa, d’obéissance ou désobéissance autour du Covid, après près de deux ans de pandémie, "Le monde d’après" souligne avec un humour ravageur, par moments féroces, par moments maladroit, les travers de nos compatriotes. Et ce qui ressort de ce tout petit métrage, qui vaut cependant le détour, c’est une sensation d’une société en plein replis sur soi, où l’on exigence que les autres se plient aux règles de chacun, et surtout où tous, sans presque aucune exception, se complaisent dans une régression quasi volontaire de ses libertés. Quelque chose qui apparaît d’ailleurs particulièrement dans l’un des neufs segments qui composent le film, lorsqu’un mari explique qu’il s’est converti a l’Islam parce qu’il a vu sa femme se plier avec presque bonheur à toutes les règles liées au port du masque.
Débutant sur un dîner où un couple de jeunes est invité chez deux personnes âgées, se retrouvant à devoir présenter leur pass vaccinal et à faire face au mari pharmacien armé d’un revolver à vaccins, le récit va ensuite dérouler avec un rythme inégal huit autres situations, impliquant tout ce qui aujourd’hui relève de l’excès d’autorité (l’apéro des trois maîtresses est sans doute le plus cynique…), du féminisme et du véganisme exacerbés, mais aussi du lien qui se distend (contact réel perdu, fantasmes qui remplacent la réalité…). Visant souvent juste, n’épargnant personne (même l’attitude des acteurs durant la pandémie est mise à rude épreuve …), "Le monde d’après" décrit donc avec un cynisme plutôt réjouissant et dans un dispositif simple, un Paris peu reluisant, mais qui a le mérite de renvoyer chacun aux sujets sociétaux du moment, sans drame, à l’image de la jolie et surprenante séquence entre les deux potes fumant des pétards. La preuve, même si les ficelles sont parfois un peu grosses et les dialogues maladroits, que l’on peut encore rire de tout, à une époque où le politiquement correct s’impose et où l’autocensure grandit chaque jour autour de certains sujets.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur