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LAND OF STORMS

Un film de Ádám Császi

Homosexualité en milieu rural

Dans son club de football allemand, Szabolcs (surnommé Szabi) découvre que son avenir dans le métier est sans doute compromis, la faute à un réel manque de talent. Revenu en Hongrie, il décide de retaper la vieille ferme de son grand-père, dont il a hérité. Il se fait aider par Aron, un jeune garçon du village, qu'il rémunère pour cela. Mais lors d'une ballade à moto un peu trop arrosée le trouble s'installe entre les deux garçons...

Si ce film, présenté dans la section Panorama du Festival de Berlin 2014 ne faisait pas l'unanimité quant à ses mérites, entre parodie d'un film érotique à la Cadinot pour les uns, et sérieux prétendant pour la remise des Teddy Awards, "Land of Storms" apparaît tout de même comme une œuvre sensible sur l'initiation et l'acceptation de sa propre différence. Situé dans une Hongrie rurale, l'intrigue montre la difficile intégration d'un jeune homme entraînant dans son sillon un autre garçon, localement bien plus connu que lui.

Choisissant la voie de la persécution, le scénario ne fait certes pas dans la dentelle dans sa dernière partie, menant chacun des deux garçons dans des directions potentiellement différentes, le considérant qu'il « est comme cela à cause » du premier. Entre eux deux, il y a certes une connaissance différente du monde, une peur de l'inconnu et du regard des autres, mais il y a aussi un troisième larron, représentant une vie plus facile dans un pays d'Europe occidentale où l'homosexualité est déjà plus acceptée.

Utilisant comme double parabole la maison en construction, représentant à la fois le projet que l'on peut potentiellement construire à deux, et le refuge que l'on bâtit face à ceux qui vous rejettent, le scénariste relate un douloureux fait divers où l'exclusion vient autant des proches (la figure du père de l'un, obstiné, ou celle de la mère de l'autre, manipulatrice) que de toute une communauté. Trahisons, hésitation entre convenable et liberté de vie, ce voyage de plusieurs jeunes adultes vers une existence où l'amour quel qu'il soit se vit, n'évite pas lui-même quelques clichés érotisant sur les rapports masculins ou la gestion des rivalités amoureuses entre hommes.

Le trio d'interprètes reste cependant des plus crédibles, donnant à voir force plus que faiblesse, et rappelle qu'il est parfois indispensable et inévitable de faire le choix de la difficulté et du danger, plutôt que celui de la facilité. Dans une Hongrie qui reste attachée à des valeurs traditionnelles, c'est ainsi le sens de la responsabilité qui motive un jeune homme devenu adulte, plus que le désir de fuir. Un film à la superbe photographie, qui sert à merveille le propos sur un pays qui a vraisemblablement encore des progrès à faire en matière d'égalité.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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