L’AFFAIRE PASOLINI
Requiem pour un artiste lucide
1975. Alors qu’il était en plein montage de « Salo ou les 120 journées de Sodome« , et qu’il était en train d’écrire un livre sur les implications d’hommes de pouvoir dans une sombre affaire, Pier Paolo Pasolini entretenait un jeune homme espérant devenir acteur. Conscient de son décalage avec la société et des dangers encourus, de par ses postures politiques, il sentait peu à peu la menace le concernant se faire plus précise…
Le film de David Grieco tâche de conter dans le détail, les événements qui précédèrent la mort de Pasolini, cinéaste provocateur, en liant notamment son assassinat au livre qu’il était en train d’écrire. Décrivant sa relation tarifée avec un jeune romain, comme empreinte de tendresse plus que de vice, le scénario prend ainsi le quasi contre-pied du film signé par Abel Ferrara en 2014 : "Pasolini". Loin de la noirceur de ce dernier, il présente l’homme comme lucide et pas si tourmenté, évitant la descente aux enfers pour mieux s’attacher à son dessein politique : dénoncer le système et les hommes qui manipulent les masses.
Derrière le titre original ("La machination" en français) se dessine donc toute une galerie de personnages, petites frappes, hommes de mains, politiques et administratifs, tous liés par une même personnalité et contribuant d’une manière ou d’une autre au destin funeste de l’auteur. Si le casting est impeccable (même l’apparition furtive de François Xavier Demaison en journaliste français, a son objectif, quasi synthétique), les deux acteurs principaux ( Massimo Ranieri en impénétrable Pasolini et Alessandro Sardelli en naïf garçon à l'ambition mesurée) portent une bonne partie de la crédibilité de ce requiem, sur leurs épaules.
La seule chose que l’on pourra reprocher à ce thriller plutôt élégant, est de s’intéresser relativement peu à la partie artistique de l’œuvre de Pasolini. Le film qu’il vient de tourner n’est ainsi évoqué que par la caméra se promenant en introduction sur un dessin au fusain, représentant des corps nus entremêlés. Quant aux effets de Noir et Blanc retrouvant progressivement des touches de couleurs, à chaque fois que l’on revient dans le bureau de l’auteur, concentré sur le livre qui lui vaudra la vie, ils sont plutôt bien sentis. Dénonçant le règne des apparences respectables (le passage du baptême est assez édifiante…) comme les influences de la drogue et l’argent faciles, le film laisse au final un petit goût amer qui sied parfaitement au sujet.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteurBANDE ANNONCE
Bande Annonce l’Affaire Pasolini vostfr from 2ifilms Distribution on Vimeo.