LA FAMILLE ADDAMS
Moderniser la plus anachronique des familles
Les Addams, contraints lors du mariage de Gomez et Morticia, de quitter leur ville natale, découvrent la demeure de leur rêves. Des années plus tard, au pied de cette colline entourée de brume, s’est créée la ville plastique régie par la redoutable Margaux Needler. Quand les Addams arrivent en ville, ils créent un certain désordre…
La famille Addams, ce sont d'abord des dessins, des dessins parus dans le New Yorker d'une famille fascinée par le morbide. Quand elle arrive au cinéma, cette famille prend des noms. Il y a Gomez, Morticia, le cousin Machin, la Chose, Oncle Fétide, Pugsley et Mercredi. La fascination pour le morbide prend vite des atours ésotériques et voilà les Addams dotés d'étranges pouvoirs.
Cette nouvelle adaptation de la famille la plus célèbre du New Jersey est un mélange de toutes les précédentes, avec un goût de modernité. On y retrouve de nombreux classiques de chaque épisode : la photo de famille, l'Oncle Fétide qui cherche une épouse, Mercredi qui tente de tuer son frère, la confrontation des enfants au monde extérieur, etc.
Les réalisateurs n'ont pas pu s'empêcher de ramener du pop et de l'acidulé dans le gothique froid et austère des Addams. Morticia délaisse sa chevelure longue et ses yeux noirs maquillés de lumière pour un carré et un fond de teint à base de cendre, la Chose a une montre tactile et Mercredi se demande comment fonctionne un téléphone, entre autres... La musique participe également à ce côté pop. Outre la traditionnelle scène avec la musique des Addams avec ces claquements de doigts uniques, l'essentiel du dynamisme, voire même de l'émotion du récit vient de la bande son. Ce qui est assez dommage quand on pense au sujet riche que les réalisateurs ont entre les mains.
Les Addams, avec leur refus du monde moderne, leur culture renfermée sur elle-même, ont un mode de vie sclérosant et c'est la première fois que ce sujet est directement adressé. L'ennui règne en haut de cette colline entourée de brume, surtout pour Mercredi, une parfaite Addams. Elle est arrivée au sommet de son art et maîtrise les codes de cette famille à la perfection. Elle a besoin de voir autre chose. Pugsley, quant à lui, est à la veille de sa Masturka, la cérémonie de passage à l'âge adulte chez les Addams. Il se trouve à son tour enfermé par cette tradition familiale aliénante car il doit exécuter une brillante démonstration au sabre (spécialité de Gomez mais némésis du jeune garçon amateur d'explosif).
Toute cela pourrait être réjouissant, mais est traité dans la narration, de manière succincte et peu approfondie. Le vrai problème est que, dans sa conclusion, le film semble se tromper de thème. Si les Addams sont comme toujours les « freaks » d'une époque, il s'agit ici d'un film sur le respect et l'acceptation des différences. Et cette aventure familiale est beaucoup plus centrée sur la construction de l'identité. Les deux enfants doivent apprendre à exister dans le monde et dans leur famille, sans se laisser aliéner. Ils doivent assumer qui ils sont car « être comme tout le monde » est aliénant des deux côtés du portail carnivore. Sous cet aspect, le film semble gagner à être vu, sinon il est reste un peu cliché, mais parfait pour une jeune audience qui voudrait découvrir cet univers.
Thomas ChapelleEnvoyer un message au rédacteur