Festival Que du feu 2024 encart

LA CONVOCATION

Un film de Kunle Afolayan

Drame féministe et panafricain

Au Nigeria, de nombreuses étudiantes sont victimes de harcèlement sexuel de la part d’universitaires qui leur font du chantage. Mais quand c’est au tour de Moremi de subir cette domination masculine, elle décide de bousculer la loi du silence et d’attaquer son professeur…

La Convocation film movie

Sortie le 6 novembre 2010 sur Netflix

Nollywood (surnom du cinéma nigérian) a beau être un des producteurs les plus prolifiques du monde (après Bollywood et devant Hollywood en termes d’un point de vue quantitatif), ses films restent méconnus en Occident, comme d’ailleurs l’ensemble du cinéma africain, peu exploité dans nos contrées en-dehors de quelques films d’auteur souvent coproduits par des sociétés européennes. Depuis quelques années, Netflix a le pouvoir de changer la donne puisque des dizaines de longs métrages nigérians sont disponibles sur la plateforme. Si la flamme n’a pas encore pris (contrairement à Bollywood dont la renommée est croissante depuis le début du siècle), "La Convocation" a peut-être la possibilité de toucher une partie du public français.

On pourrait se focaliser sur les maladresses de réalisation, sur le jeu pas toujours convaincant (sauf Jimmy Jean-Louis, impeccable de bout en bout), sur les longueurs inutiles ou sur certains effets mélo excessifs. Mais ce serait une attaque injuste concernant ce drame inspiré de faits réels, qui a pour intérêt majeur de déconstruire des clichés tenaces concernant une Afrique soi-disant à la traîne sur tous les points (on se souvient encore du discours scandaleux de Sarkozy en 2007 : « l’homme africain n’est pas assez entré dans l’Histoire »).

Tout à fait dans l’air du temps, ce récit nous montre donc, notamment, que la libération de la parole n’a pas seulement concerné les femmes américaines et européennes depuis quelques années : au Nigeria, il y a en effet une véritable prise de conscience qui émerge concernant les abus sexuels dont les femmes sont victimes – en particulier dans le cadre de leurs études mais pas seulement. Le réalisateur Kunle Afolayan s’est ainsi emparé du sujet pour cette "Convocation" explicitement féministe, dont la mise en scène a au moins deux mérites : celui de proposer une construction non linéaire, qui apporte plus de dynamisme et tension (compensant ainsi d’autres choix plus grossiers ou statiques), et celui de donner une place centrale au regard de son héroïne, confinant le point de vue du personnage masculin à sa seule parole pour mieux le décrédibiliser en lui confisquant l’image alors que ce protagoniste est un expert en manipulation.

On aurait pu se satisfaire de cet aspect mais "La Convocation" parvient aussi à intégrer, grâce au cursus universitaire suivie par l’héroïne, une intelligente réflexion sur l’importance historique, géopolitique et culturelle de l’Afrique, avec une analyse panafricaine rendant hommage et dignité à ce riche continent bien souvent regardé avec condescendance par les grandes puissances mondiales.

Raphaël JullienEnvoyer un message au rédacteur

BANDE ANNONCE

Laisser un commentaire