L'AUTRE LAURENS
Faux film américain, vrai nanar de luxe
À la mort de son père, Jade Laurens se rend chez son oncle, qui n’est autre que le frère jumeau du défunt. Mais comme celui-ci est également détective privé, elle veut le convaincre de mener l’enquête sur la mort de cet autre Laurens…
Tout dans ce polar réalisé par Claude Schmitz fleure bon la naphtaline. Pour son premier long métrage, après plusieurs courts et une carrière au théâtre, le belge de 43 ans livre "L’autre Laurens" un combo de tout ce qu’on a aimé dans notre enfance. En gros, les bons vieux films d’action américains bourrés à l’humour et à la testostérone ! Schmitz ("Braquer Poitiers") s’accapare tous les poncifs du genre pour les mixer dans un petit film franco-belge façon nanar de luxe. Vous y retrouverez ainsi l’enquête policière autour d’un crime mystérieux, un détective privé sans le sou mais coriace, un duo comique de policiers gauches, une blonde platine poursuivie par des bikers faussement méchants, un final en hélicoptère…
Même les décors transpirent l’Amérique ! Reconnaîtrez-vous la fausse Maison-Blanche en guise de demeure où règne la beauf’ attitude, en réalité à Perpignan ? Ainsi que cette frontière Old El Paso et ce grand canyon made in Espagne. Derrière cette série B plane donc en permanence le spectre du ciné US, mais aussi – en parlant de spectre – de la plus haute littérature anglaise : celle de Shakespeare ! Son « Hamlet » est sans conteste l’une des grandes influences de cet "Autre Laurens", à travers l’image du fantôme et de la vengeance du frère. Mais, avec un tel grand écart, le spectateur ne risque-t-il pas de se retrouver sur deux tableaux qui ont du mal à se superposer ?
Heureusement, Schmitz maîtrise la comédie et on jubile aux apparitions de ses losers, aux avant-postes desquels les Dupont et Dupond (avec l’excellent Rodolphe Burger) ainsi que les interventions déjantées des motards (avec le génial Marc Barbé). Olivier Rabourdin, que l’on vient de voir dans le dernier Catherine Breillat ("L’Été dernier"), confirme qu’il peut tout jouer, même parfois avec beaucoup de second degré. Et il en faut ici par moments pour se laisser pleinement aller à cette version tragi-comique d’un polar hitchcockien. Parfois, le ridicule n’est pas loin, mais comme il ne tue pas… tentez peut-être votre chance.
Mathieu PayanEnvoyer un message au rédacteur