L'AIR DE LA MER REND LIBRE
Un moule imposé
Saïd, 23 ans, homosexuel, a fini par céder à la pression de ses parents. Il doit épouser Hadjira, venue de Miramas à Rennes avec sa mère pour la cérémonie à la mairie. Passablement alcoolisé, il s’enfuit pour rendre visite à son ancien amant, Vincent, qui l’envoie bouler. Il revient alors et le mariage peut avoir lieu, les engageant tous les deux dans une vie commune…
Chapitré selon les trois principaux personnage de ce triangle amoureux, Hadjira, Vincent, Saïd (puis Hadjira et Said pour conclure sur un lien qui n’en avait jusque là que les apparences), "L’air de la mer rend libre" est le nouveau long métrage de Nadir Moknèche, réalisateur de "Viva Laldjérie", "Lola Pater" et "Goodbye Marocco". Car en matière de vie commune, le couple formé par Hadjira et Saïd, mariés l’un pour satisfaire ses parents, l’autre pour faire oublier une histoire de cœur, n’en aura que les apparences, le film n’hésitant pas à montrer l’approche diamétralement opposée des deux personnages, l’une se réfugiant en partie dans la pratique religieuse, l’autre se laissant aller à ses pulsions, via applications de rencontres et sorties nocturnes sous prétexte d’un fallacieux jogging. La chasteté de la première, son désir d’une vie sociale, vont alors se heurter à la sexualité active de l’autre, tout comme à son besoin de fuite.
De moule imposé il est donc question ici, qu’il s’agisse de ce couple destiné à faire un enfant pour combler de futurs grands parents et à faire des membres d’une famille « des gens biens », ou qu’il s’agisse de comportements sexuels consommateurs, s’opposant ainsi à ce qu’amenait Vincent dans la vie de Saïd. De principes il s’agit aussi, transmis docilement ou par la contrainte, de génération en génération, en méprisant les aspirations des uns ou des autres. Dans ce sens "L’air de la mer rend libre" n’hésite pas à proposer une nouvelle voie, grâce à ses deux jeunes interprètes ( Youssouf Abi-Ayad est une véritable révélation, Kenza Fortas affiche juste ce qu’il faut de fronde…), face à deux mères incarnées avec brio par Saadia Bentaïeb ("Ghost Tropic") parfaitement butée et Lubna Aaabal, incroyable de vulgarité criarde.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur