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L'ABBÉ PIERRE – UNE VIE DE COMBATS

Un film de Frédéric Tellier

Un film long et pesant, où surnage Benjamin Lavernhe

Henri Grouès, né le 5 août 1912 à Lyon, faisait partie d’une famille bourgeoise avec 8 enfants, dont le père dirigeait des fonderies. Membre de l’ordre des Capucins, sa santé fragile fait qu’il se doit d’être plus utile ailleurs. Il quitte la confrérie à la veille de la Seconde Guerre Mondiale, pour laquelle il va être mobilisé quelques mois plus tard…

L'Abbé Pierre, une vie de combats film movie

Le moins que l’on puisse est que lors de sa présentation à Cannes, l’avant-dernier jour du festival, en mai dernier, "L'Abbé Pierre, une vie de combats" était loin d’avoir fait l’unanimité. Il faut dire que le film est non seulement extrêmement long, sans doute pour tenter d’approcher la richesse incroyable de la vie de l’homme, mais qu’il s’avère aussi particulièrement pesant, dans la forme, comme sur le fond, privilégiant largement la parole du prêtre, à la moindre action. Pourtant le long métrage n’avait pas trop mal démarré. La scène d’ouverture, sous une nuit étoilée particulièrement graphique, faisant place à la voix-off de l’Abbé, laissait espérer une bonne dose d’onirisme. Celle-ci ne viendra jamais, l’auteur se contentant de boucler en fin de métrage sur cette même scène, pour appuyer encore une fois le côté « saint » et « sage » de son personnage. La scène d’embuscade durant la seconde guerre mondiale, alors que l’homme d’église faisait passer des juifs dans la neige, insistant justement sur la douleur de la trahison, s’avérait des plus saisissantes. Mais ce ne sera qu’un feu de paille.

Le reste du film, une fois les images d’archives de la libération passées, ne sera plus que présentations successives des évolutions de positionnement de l’homme (député, directeur d’association, mendiant…), de ses inventions visant à lutter contre la pauvreté comme ses bienfaits (Emmaüs, recyclage, logements sociaux…). Le tout permet certes de resituer son action et l’importance qu’elle a pu avoir (et peut encore avoir aujourd’hui), mais la tension comme l’émotion sont désespérément absentes de ce panorama à vrai dire particulièrement rébarbatif. Pire, le réalisateur se contente d’aligner jusqu’à l’overdose les discours de l’Abbé, qui certes soulignent des faits indéniables, sources de sentiment de révolte (« en temps de guerre les caisses ne sont jamais vides », ), se permet juste de temps à autre quelques flous signifiant les faiblesses physiques de l’homme. C’est cependant de certains d’entre eux, repris intégralement (l’allocution radio suite au grand froid…) que viendront quelques moments forts.

Mais cela ne fait pas un film, pas plus que de réduire l’action à un supposé miracle, qu’on ne nous épargnera pas, vue la nature religieuse de l’homme. Sorti de cela, les quelques dialogues paraissent souvent bien simplistes, à l’image du personnage de Lucie Coutaz, interprété avec peu de nuances par Emmanuelle Bercot, qui sert juste ici de faire-valoir. Heureusement, Benjamin Lavernhe ("Le Sens de la fête", "De Grandes espérances") parvient à incarner l'homme de manière convaincante, allant jusqu'à reprendre son accent. Sa prestation est sans doute le seul réel intérêt de ce nouveau long métrage consacré à l’Abbé Pierre, 34 ans après celle, mémorable de Lambert Wilson dans "Hiver 54". Une vraie déception, d’autant plus qu’elle était porté par le metteur en scène, d’usuelle très efficace de "L’Affaire SK1" et "Goliath", ou encore "Sauver ou périr", dont on se dit que la maestria a sans doute été bridée par le caractère iconique et « sacré » de son personnage.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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