JUNG_E
Terrible Jung_E
En l’an 2135, dans un contexte post-apocalyptique dû au changement climatique, deux camps, les Alliés et la République d’Adrian, s’affrontent depuis 40 ans dans un interminable conflit mondial. La solution est peut-être dans le développement d’un robot développé dans un laboratoire des Alliés. Celui-ci est pourvu d’un cerveau clonant celui d’une célèbre mercenaire coréenne…
Sortie le 20 janvier 2023 sur Netflix
Célébré avec l’excellent film de zombies "Dernier train pour Busan" en 2016, convaincant pour sa première réalisation Netflix avec la comédie fantastique "Psychokinesis" en 2018, le réalisateur sud-coréen Yeon Sang-ho revient sur la plateforme avec un film de science-fiction… et c’est un plantage en bonne et due forme !
En ouverture, un texte de présentation nous promet un film grandiose sur fond de guerre mondiale dans un 22e siècle post-apocalyptique et high tech où les humains vivent majoritairement en orbite autour de la Terre à cause du changement climatique… Sauf que cela sonne ensuite comme une publicité mensongère, car on s’attend à des décors spatiaux qu’on ne verra quasiment jamais et à des scènes de combats qui seront distillées en quantité négligeable (et par ailleurs sans grand intérêt). Au lieu de cela, la lourdeur de "Jung_E" est rapidement palpable dans ce qui est en grande partie un huis clos cheap au sein d’un laboratoire technologique.
Dans ce décor inintéressant au possible, des scientifiques développent un robot militaire, Jung_E, doté d’une intelligence artificielle qui réutilise les données du cerveau cloné d’une célèbre combattante, la capitaine Yun Jung-yi. Cerise sur le gâteau : celle qui dirige le programme de recherche n’est autre que la fille de cette légende, Yun Seo-hyun (incarnée par Kang Soo-yeon, décédée peu après le tournage), qui n’était encore qu’une petite fille lorsque sa mère est morte au combat. Le film semble ainsi nous promettre des émotions bouleversantes, mais le récit s’alourdit encore avec un enjeu médical concernant Yun Seo-hyun, et surtout à cause de l’étrange apathie de ce personnage, qui s’avère incroyablement inexpressif et fade – et même longtemps passif. A contrario, l’autre protagoniste-phare du laboratoire est exagérément extravagant (d’autant que Ryu Kyung-soo accentue le trait avec un jeu outrancier), ce qui agace et fatigue en moins de deux minutes alors qu’il faut se farcir cet énergumène jusqu’à la fin ! L’actrice Kim Hyun-joo s’en sort finalement mieux en interprétant le robot-clone, aux expressions et comportements bien plus équilibrés et subtils que les deux personnages pré-cités.
Peu inventif dans son scénario, et cela jusqu’à une conclusion bâclée qui achève de décevoir toutes nos attentes, "Jung_E" se montre intéressant sur un seul aspect : la critique d’un capitalisme capable d’exploiter commercialement l’image d’une résistante et de cannibaliser les données cérébrales au travers d’un transhumanisme inégalitaire, dans une société qui offre technologiquement trois possibilités de prolonger artificiellement sa vie, mais avec des droits différents selon les moyens de chaque individu. Malencontreusement, Sang-ho Yeon n’exploite pas assez ce potentiel au sein d’un long métrage mollasson où dominent surtout les clichés et l’ennui.
Raphaël JullienEnvoyer un message au rédacteur