JOAQUIM
Rêves d’une meilleure situation
Film brésilien, "Joaquim" suit un lieutenant de l'armée portugaise, chargé d’arrêter des trafiquants à un avant-poste, et envoyé dans l'arrière pays pour trouver un nouveau filon d'or. Futur acteur d'une révolte avortée, sa tête décapitée s'adresse en voix-off au spectateur dès la scène d’ouverture, sous une pluie battante, pour expliquer son sort. Une manière de signifier que le réalisateur s’intéressera par la suite aux conditions de l’équipe et à ce qui a mené cet homme sur le chemin d’une révolution, ceci avec un œil lui aussi embué et déformé par le temps qui a passé.
Le scénario introduit ainsi par la suite ses motivations : l'argent, une promotion et surtout la possibilité de racheter une d'esclave noire dont la sensualité le rend fou. Récit d'inégalités sociales, de misère et d'exploitation, le film rappelle aussi les conditions de vie déplorables de l'époque, entre crasse, récurrence de parasites, habits militaires voyants et inadaptés à la chaleur, esclavage… Les gestes quotidiens sont donc rudimentaires (on se rase au couteau, on arrache une dent non sans une douleur atroce). Les scènes de sexe sont, elles, bestiales, montrant des jambes écartées dans la pénombre...
Mais outre son approche sociale désenchantée, contant inégalités de conditions selon les origines sociales, les nouvelles lois sur l’adultère, ou encore des relations ambiguës avec les esclaves, "Joaquim" recèle de plus de véritables qualités esthétiques, le réalisateur exploitant notamment les noirs à merveille (la recherche de l'esclave de nuit, le moment où ils font du feu en frottant des pierres). Une œuvre d’une belle noirceur, traitant d’aspirations sociales contrariées, portée par quelques interprètes mis à rude épreuve, tels Julio Machado et Nuno Lopes.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur