JEUX DE DUPES
Une agréable comédie façon Capra ou Hawks
1925. Le football américain professionnel peine à remplir les stades, tournant le plus souvent, faute de véritables règles, à la baston générale. Abandonnée par les sponsors, l’équipe des « Bulldogs » doit donc se dissoudre, renvoyant ses joueurs aux champs ou à la mine. L’ancien capitaine Dodge Connolly, fringuant quarantenaire, se retrouve quant à lui au chômage. Face au succès remporté par le football universitaire et plus particulièrement à l’engouement autour d’un jeune joueur prodige, Carter dit « le bolide », Connolly convainc celui-ci de passer professionnel du côté des « Bulldogs », afin de ressusciter l’équipe. Une jolie journaliste aux dents longues se joint à l’équipe, prétextant un reportage sur Carter, célèbre pour son jeu phénoménal mais aussi pour l’héroïsme dont il aurait fait preuve face aux allemands au cours de la guerre…
Après les années 70 (« Confessions d’un homme dangereux ») et les années 50 (le très beau « Good night, and good luck »), George Clooney s’intéresse à une nouvelle période de l’histoire de son pays. Bien que moins politique que ses précédents films, « Jeux de dupes » offre un concentré social d’une époque : celle où l’Amérique se passionnait pour le sport afin d’oublier ses maux. Sous son apparente légèreté, le film décrit notamment l’attachement aveugle et inconditionnel aux héros de guerre, une valeur à la résonance encore très actuelle.
Le scénario combine donc habilement une peinture sociale (avec le sport comme point de convergence), une pseudo-enquête policière (ce héros de guerre serait-il un imposteur ?) et même une intrigue sur le thème de la déontologie, au travers des dilemmes qui finissent par animer le personnage de la journaliste infiltrée, en quête de scoop (étonnante Renée Zellweger, à croire qu’elle a trouvé son créneau).
On retiendra donc de ce film qu’il présente tous les ingrédients propices au divertissement : un brin de nostalgie à l’américaine (magnifique scène de jazz dans un club illégal), quelques scènes bien glamour, un peu d’action (ça se castagne souvent, mais toujours de façon très théâtrale, donc drôle) et bien sûr une bonne dose d’humour à la Clooney, cette marque de fabrique qui lui vaut depuis quelques années toutes les sympathies. Il a d’ailleurs l’air parfaitement à l’aise dans cet univers des années 20, tant d’un point de vue de l’interprétation - son rôle de vieux beau à la Clark Gable lui sied comme un gant - que de la réalisation. Parce qu’il a du style tout en restant sans prétentions, « Jeux de dupes » s’inscrit avec les honneurs dans la lignée des comédies de Capra et d’Howard Hawks.
Sylvia GrandgirardEnvoyer un message au rédacteur