JEUNE FEMME
Fille perdue, avec chat !
Après avoir vécu 10 ans au Mexique, Paula revient en France avec Joachim, un photographe reconnu avec qui elle vit. Ce retour à Paris se révèle douloureux puisque à peine arrivé, Joachim décide de la quitter pour une autre. Perdue et sans attache, Paula erre alors un chat sous le bras, de connaissances en inconnus pour retrouver un peu de réconfort…
Il y a des films comme ça qui vous charme dès la première seconde. « Jeune femme » est de ceux-là. Une insulte criée dans un minuscule couloir, un coup de tête violent contre une porte et nous voilà soudain aux urgences avec une femme survoltée, crinière rousse ébouriffée et yeux vairons, un pansement ensanglanté sur le front. Le monologue qu’elle vocifère à l’infirmier blasé est jubilatoire tant se déchaîne la truculente folie de l’héroïne. Un personnage aussi attachant qu’imprévisible incarné par Laetitia Dosch, une actrice tout aussi volcanique, qui porte chaque scène du film avec une frénésie communicatrice.
Cette introspection vagabonde, où l’humour flirte avec la subtile analyse d’un personnage en perdition, est exaltée par une parfaite maîtrise du rythme. Léonor Serraille joue avec talent des mouvements de caméra autant que des ellipses scénaristiques. Son histoire, où un seul personnage rayonne entre une multitude d’autres, offre une galerie de portraits où chacun à sa place et ne sert pas uniquement de faire-valoir au premier rôle. Cet éclectisme se conjugue alors avec une autre diversité, puisqu’en quelques jours seulement, la jeune femme va traverser différentes couches sociétales toutes aussi contrastées que son caractère volatile.
Compagnon involontaire de la quête désespérée de Paula, le chat qu’elle vole à son ex, agit tel un ressort scénaristique pour faire rebondir le personnage dans un univers qui lui sera moins hostile. Une progression qui accompagne la métamorphose de cette héroïne qui, au fil de ses rencontres, abandonne son petit côté peste pour donner plus de profondeur à son tempérament. Ainsi, cette « jeune femme » sort du cadre pour mieux l’habiter dévoilant une réalisatrice qui sait s’appuyer sur ses talents d’écriture pour donner du corps à son récit. Une révélation qui n’a pas échappé au jury de la Caméra d’or puisque le film s’est vu décerné ce précieux prix, lors du 70e festival de Cannes.
Gaëlle BouchéEnvoyer un message au rédacteur