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INSIDIOUS : THE RED DOOR

Un film de Patrick Wilson

« Alors ? On n’attend pas Patrick ? »

10 ans ont passé depuis la première rencontre entre la famille Lambert et le monde surnaturel qui avait plongé le fils aîné Dalton dans le coma. Après avoir décidé d’effacer de leur mémoire ces terribles événements, la famille a continué son bout de chemin mais pas sans traumatismes. L’arrivée de Dalton à la fac va malheureusement faire ressurgir ce passé qu’ils auraient préféré oublier…

Insidious : The Red Door film movie

La saga "Insidious" est indissociable de ses créateurs ; James Wan et Leigh Whannell. Les deux compères peuvent se targuer d'avoir remis le torture-porn au (mauvais) « goût » du jour avec "Saw" premier du nom en 2004 ainsi que le film de maison hantée via la société BlumHouse, caractérisée dans la production de films à grandes idées mais avec des petits budgets. Ce renouveau ou plutôt ce retour aux sources moins graphique, plus fantastique, se fera avec deux films qui marqueront la culture populaire : "Conjuring – Les Dossiers Warren" premier du nom sorti en 2013 et bien entendu 3 ans plus tôt, "Insidious". Après leur succès monstres, et comme toujours dans ces cas à Hollywood, ils vont donner naissance à deux franchises très lucratives, à la qualité malheureusement aléatoire, voire absente, surtout du côté de l'univers développé autour de "Conjuring".

De son côté la saga "Insidious" comporte les deux premiers volets réalisés par James Wan, un troisième chapitre prequel (racontant des histoires se déroulant avant) centré sur la médium de la saga (géniale Lin Shaye) signé Leigh Whannell, et un quatrième film, toujours écrit par Whannel mais réalisé par un technicien sans personnalité. Arrive alors ce 5ème opus qui se veut être une suite directe du deuxième film. Fini de remonter dans le temps et de nous faire languir un retour de notre famille bien aimée, ce nouveau volet compte bien reprendre les choses là où on les avait laissées.

L'attente a été réelle et même si le cinéaste des premiers opus ne revient pas, c'est Patrick Wilson qui prend la relève. Interprète de Josh Lambert, le père de famille, le choix paraissait à la fois cohérent (également tête d'affiche de la saga "Conjuring", le monsieur est un proche collaborateur de James Wan) et à la fois déroutant. En effet, confier la « conclusion » d'une saga culte à un metteur en scène novice n'est pas là pour nous rassurer. Et le constat est sans appel : Patrick Wilson se veut être un élève appliqué de la recette Wan (cadrages biscornus, mouvements de caméras amples, tension crescendo...) - et la plupart du temps il y parvient -, mais sans éclat malheureusement. Et cette « Red door » méritait plus d'énergie pour son train fantôme afin de nous scotcher à nos fauteuils comme avait su le faire le premier opus.

Pas d'images réellement marquantes, des procédés horrifiques mécaniques que l’on distingue à des kilomètres à la ronde, et c'est bien dommage, car les procédés mis en place auraient pu avoir plus d'impact dans leur résolution. Typiquement le petit jeu du « memory » auquel s'adonne Josh est intéressant. Il est classique dans son exécution, mais la tension est réelle. Hélas il se clôture avec un fantôme qui explose littéralement le dispositif. Pour la subtilité on repassera et pour les frissons aussi. Bien qu'il y ait un plaisir véritable à retrouver notre famille Lambert, le film n'arrive en aucun cas à titiller notre trouillomètre. Hormis lors de quelques séquences de peintures et quand un démon à quatre pattes se faufile dans la pénombre avant que Josh ne ferme la porte, le film ne crée jamais vraiment une scène marquante et terrifiante.

On est en droit de regretter ce manque d'audace formelle ou d'ambition horrifique, surtout quand, comme pour l'auteur de ces lignes, le premier volet a été une expérience qui a laissé ses traces sur le long terme. Le film perd forcément des points car si cette franchise a une place particulière dans le cœur des aficionados de films de genre, c'est bien pour ces moments de flippes. Mais depuis que Wan a délaissé la saga côté mise en scène, le niveau n'a fait que de diminuer. Et ce nouveau chapitre le confirme. Par contre, on notera une attention toute particulière apportée ici aux personnages et à la notion de traumas.

Depuis leur mémoire effacée, Josh et Dalton ont gardé des séquelles. Le père se sent « embrumé », perd la mémoire sur les choses du quotidien, se sent distant des vivants. Alors que le fils vit avec le tabou de l'abus, de la violence du père possédé dans le chapitre 2 et n'a que pour seul refuge la peinture. Et c'est peut être dans cette volonté de créer un parcours de rédemption pour ce père et ce fils que le film touche le plus. Entre les moments d'égarements de Josh - avec en prime la meilleure scène du film avec un Josh coincé dans un IRM - et les sessions de peinture de son fils, le film essaye de nous raconter quelque chose qui se rapprocherait plus du drame. Ces mêmes moments là sont les plus réussis en termes d'ambiance : alors que Dalton déverse ses névroses sur les toiles, la mise en scène se fait plus immersive et donne lorgne sur "The Devil's Candy" (Sean Byrne, 2015) côté cinéma ou encore "Layers of fears" pour le jeu vidéo. Une touche plutôt bienvenue même si ces séquences manquent de force évocatrice et d'un vrai travail d'appropriation du médium cinématographique.

Une petite mention pour la musique emblématique de Joseph Bishara (à l'œuvre sur tous les films de la franchise) qui ne parvient qu'à de trop rares moments à retrouver la puissance de ses précédentes compositions. Pourquoi diable ne pas réutiliser le thème si culte du premier et en faire des déclinaisons au milieu de compositions originales ? Et ce n’est pas la mention en quelques notes du “Looking West” de Rose Byrne du premier opus qui nous contentera. Dommage encore une fois que Patrick ne s’amuse pas avec la résonance des œuvres entre elles, du début de la saga avec sa fin, via nos sens pour en accentuer la force émotionnelle.

Et malgré ces thématiques intéressantes, le film ne les met que rarement en image hormis lors d'une séquence reprenant les événements du climax du deuxième film, où Josh manque de tuer sa famille. Là encore, cet extrait est là pour nous rappeler à quel point, si le premier chapitre était un monument de trouille, sa suite était l'exemple de la parfaite suite où le scénario y était tour à tour passionnant et étonnant. Il avait le mérite de pas faire dans la redite, quitte à donner dans la boulimie scénaristique. Hormis l'apport psychologique de la relation père-fils, ce cinquième épisode passe finalement son temps à se souvenir du scénario... du premier ! D'où cette désagréable sensation de voir des personnages se débattre avec leur mémoire, alors que nous, spectateurs, sommes au courant de tout. Pour l'implication et le jeu avec son audience on repassera.

On voit bien au final que Patrick Wilson prend l'entreprise avec sérieux et respect, mais sans vouloir faire bouger les choses. "Insidious : The red door" apparaît donc comme une copie sans éclat, où Monsieur Wilson s'est bien appliqué à respecter les consignes, mais pas plus. Dommage, car ce retour du démon rouge du premier épisode a été tant mis en avant dans la promo, que son exécution laisse à désirer. Pas de mythologie plus approfondie à ce niveau et surtout la menace revient seulement sur les 20 dernières minutes de métrage. Est-ce que cela suffit pour nous réveiller ? Oui. Est-ce que cela suffit pour qu'on soit satisfait et rassasié ? Clairement, non. On se dit au 6ème ?

Germain BrévotEnvoyer un message au rédacteur

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