HOW TO HAVE SEX
Analyse d’une intimité sous pression
Tara, Skye et Em,trois amies inséparables, partent en vacances en Grèce afin de célébrer la fin de leurs examens et leur potentiel entrée en Université. Au programme : faire la fête autant que possible et sans limite. L’occasion rêvée pour Tara de perdre enfin sa virginité, un poids que Skye n’arrête pas de lui rappeler…
Tara, Skye et Em : trois jeunes filles anglaises de 17 ans, expertes dans l’art de s’habiller pour en paraître plus de 18, débordantes d’une énergie propre à l’adolescence et joyeusement persuadées de leur amitié éternelle. En débarquant en Grèce pour quelques jours de vacances après leurs examens de fin d’année, nos trois amies savent exactement ce qu’elles veulent : une chambre avec vue sur la piscine, boire jusqu’à vomir et recommencer... et surtout permettre à Tara de perdre sa virginité. Assez vite donc, se dessinent les différents enjeux de ce voyage de toutes les folies, sur lequel souffle ce qu’on imagine être un premier vent de liberté pour nos héroïnes en quête de divertissement et de souvenirs à ramener dans leurs valises.
Tara est la plus petite des trois, la plus grande gueule aussi. Skye la complimente souvent sur son apparence pour parfois la rabaisser sur son intelligence, ou en tout cas sur ses résultats scolaires peu encourageants. Une rivalité sourde plane sur leur amitié dite indestructible. C’est Skye qui la ramène souvent au fardeau que semble être sa virginité avec une bienveillance teintée d’acidité. Alors, quand Tara rencontre Badger et Paddy, deux garçons d’un appartement voisin, elle commence à se préparer à l’éventualité de passer à l’action…
"How to have Sex" raconte ainsi de manière quasi documentaire la manière dont on s’inscrit en tant qu’individu dans une histoire écrite par la société ; une histoire distordue qui devient une légende : perdre sa virginité c’est passer d’enfant à femme, la garder c’est ne pas grandir. Dans cette légende, les termes désir, plaisir et consentement ne sont évidemment pas prononcés. Il faut le faire comme un rite de passage obligatoire, sans se poser de question. Il faut le faire pour ressembler à tout le monde. Molly Manning Walker, dont c’est le premier long-métrage, réussit à retranscrire de manière assez subtile ces impressions universelles ressenties à l’adolescence. On ressent la pression que Tara s’inflige à elle-même comme on pressent la façon dont cette vulnérabilité pourrait vite être exploitée.
Primé dans la section Un certain regard à Cannes, "How to have Sex" est un film important à décortiquer, utilisant un point de vue lucide sur un sujet peu exploité au cinéma : la sexualité féminine à l’adolescence est une sexualité dangereusement amputée de certaines notions capitales, dont il peut être salvateur de rappeler l’importance.
Amande DionneEnvoyer un message au rédacteur