HORS DU TEMPS
Face à l'arrêt du monde, deux ressentis différents
Un réalisateur, et son frère Étienne, dans l’industrie de la musique, sont partis se réfugier pour le confinement, dans la maison de leur enfance, voisine d’un grand domaine dans lequel ils ont de nombreux souvenirs. Accompagnés chacun de leur compagne, ils apprennent à vivre ensemble pour la première fois avec celles-ci. Et le quotidien se passe, chacun vivant à sa manière ce pseudo isolement…
D’emblée, la voix-off d’Olivier Assayas vient placer "Hors du temps" parmi les chroniques intimes. Présentant les lieux de son enfance, une maison dans la vallée de Chevreuse, proche du grand domaine voisin, avec son parc, sa mare et son terrain de tennis, où son frère et lui jouaient étant enfants. Une manière sans doute de rendre ces lieux familiers, dès le départ, avant de rentrer plus tard à l’intérieur de la demeure, pour égrener d’autres souvenirs, photos et documents à l’appui. Une manière aussi d’introduire son double (Vincent Macaigne, remarquable de sobriété) cinéaste, amateur de littérature, et son frère, dans le milieu de la musique et chroniqueur sur France Inter, avant de donner un peu d’espaces aux deux compagnes avec lesquelles le confinement sera la première expérience de vie commune.
Interrogeant le rapport de chacun des deux comparses au confinement, l’un étant dans la totale paranoïa vis à vis du virus, espérant pouvoir tout contrôler, et l’autre étant pressé de retrouver sa liberté, le film prend tout son sens dans ses toutes dernières minutes, avec le constat d’un vécu totalement différent pour les uns et par les autres, entre enfermement que de petits rituels peuvent apaiser (l’obsession du frère pour les crêpes) et sentiment de pause face à un cours du monde qui va de plus en plus vite. L’aspect comédie de l’ensemble, avec une autodérision assumée, ne fonctionne pas toujours, la faute sans doute à ce qui relève souvent de la private-joke entre proches. Mais le film parvient à transmettre un amour de l’art, musical comme pictural, qui résonne plus comme une envie de partager et de découvrir, que d’étaler son érudition. Au final, "Hors du temps" nous permet progressivement de nous attacher à ses personnages, même si leurs problèmes nous paraissent par moments anecdotiques, grâce à des interprètes des plus justes : Nine D'Urso fait des étincelles en duo avec Macaigne et Nora Hamzawi surprend dans un rôle plus sérieux qu’à l’habitude.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur