LA HORA CERO
Nerveux, bien ficelé et plus profond qu’il n’y parait
Diego Velasco, qui signe ici son premier long-métrage, plonge, dès le départ, son public dans l’ambiance de la grève qui fit rage au Venezuela en 1996 en agrémentant son générique d’extraits de journaux télévisés de l’époque rendant compte de la débandade dans laquelle s’était retrouvé le pays. Dès lors, ce thriller d’action commence sur les chapeaux de roues, la caméra remuant comme dans un épisode de « The Shield ». Course poursuite en moto, réquisition de voiture avec violence pour secourir dans l’urgence une jeune femme enceinte dont on ignore si l’enfant qu’elle porte est le fils du tueur à gage et chef de gang qui lui vient en aide, « La Hora cero » ne lâchera pas son rythme effréné une seule seconde.
Le film se montre donc en premier lieu sous des airs musclés, sanguinolents et avec des effets de mise en scène très clinquants dignes des CSI et consorts (avec d’horribles ralentis et flashs à la clé). Mais se formaliser dès les premières séquences serait une erreur, car derrière sa violence très graphique se cache un film qui dénonce pelle mêle les dérives du système de santé : le mannequin en chirurgie esthétique alors que le reste du pays ne peut se soigner, l’écart entre riches et pauvres qui s’accroît quand il s’agit de l’accès aux soins, mais également les médias recherchant le sensationnalisme ou encore l’hypocrisie et la corruption des dirigeants.
Toutes ces constatations justifieraient presque les exactions perpétrées par le chef de gang lorsqu’il s’agit de sauver cette femme et son enfant, et tout spécialement lorsque son identité est révélée. Cette balance entre le bien et le mal est par ailleurs l’une des pierres angulaires du long-métrage, en plus de son excellent scénario et de son rythme haletant et saisissant. Tous les moyens sont-ils bon pour la bonne cause ? Même s’il ne répond pas à la question qu’il soulève, « La Hora cero » reste une proposition de cinéma tout à fait efficace qui, en plus d’avoir connu un succès retentissant au Venezuela, a reçu plusieurs prix lors de festivals latino-américains aux États-Unis.
Alexandre RomanazziEnvoyer un message au rédacteur