Festival Que du feu 2024 encart

HOPELESS

Un film de Kim Chang-hoon

« Noir c’est noir, il n’y a plus d’espoir »

Un jeune garçon intègre progressivement une organisation criminelle. En son sein, il découvrira une spirale de violence face à laquelle il n’était pas préparé…

Pour son premier long métrage, il est peu dire que Kim Chang-hoon a soigné son entrée en matière. Une caméra à ras du sol. Une chaussure usée. Un caillou. Un jeune garçon qui s’en empare et qui frappe violemment un autre avec. Aucun doute, nous serons dans un polar noir, sans concession, où la violence dégouline à l’écran, où chaque coup résonne, le bruit des os brisés en métronome de la bande-son. Ce gamin qui tape avant de réfléchir, c’est Yeon-gyu, adolescent introverti, meurtri par la violence d’un beau-père alcoolique, et qui trouve dans ses poings un semblant de réponse à ses maux. Sa rencontre avec un gang local va lui permettre de s’extraire de son quotidien, même si cela implique de faire couler encore plus de sang.

À l’image de son titre, l’espoir a disparu de cette ville où prend place la tragédie. Tout y est sordide et dégoûtant, chaque recoin est gangrené par la corruption. Ici, ce n’est pas de la dépravation des élites dont on parle, mais de celle des petites gens, de ceux qui choisissent le crime par nécessité ou par ennui. Dans cette grisaille, les mafieux apparaissent alors comme un ascenseur social, le moyen d’arriver au sommet de la pyramide de cette pègre des bas-fonds. Au-delà de la puissance de certaines séquences, âpres et rugueuses, le film séduit par son refus de glorifier le parcours du protagoniste. Les truands ne sont pas des héros. Et c’est bien à une descente aux enfers à laquelle on assiste.

Si ce thriller aurait mérité à être raccourci, un bon tiers de l’ensemble n’étant qu’une simple répétition d’enjeux précédemment explicités, "Hopeless" est indéniablement une belle surprise, une œuvre qui a digéré les classiques américains (Scorsese et De Palma en tête) pour en proposer une variation intéressante, profondément ancrée dans un paysage urbain coréen où l’Europe apparaît comme une terre d’exil et de promesses. En développant une relation ambigüe entre son personnage principal et le leader des hors-la-loi, à la limite parfois de l’érotisme, le cinéaste élève son récit brutal en une chronique aiguisée sur une jeunesse désabusée. En résulte, un drame probablement trop bavard mais généreux dans sa fureur, assumant les scènes dérangeantes et les dialogues qui tachent, jusqu’à un final particulièrement réussi. Le comité du Certain Regard du Festival de Cannes 2023 ne s’est pas trompé en lui offrant les honneurs de la sélection.

Christophe BrangéEnvoyer un message au rédacteur

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