HIC (DE CRIMES EN CRIMES)
Un enthousiasmant jeu de piste visuel et sonore
L’histoire se déroule dans un village hongrois apparemment paisible. Pourtant la population est petit à petit décimée par une étrange série d’empoisonnements. Un film basé sur un véritable événement qui avait bouleversé la Hongrie des années 20…
1h15 d'un fluide hoquet visuel et sonore suffisent à nous enivrer dans ce premier film de György Pálfi. Ce cinéaste hongrois de 29 ans nous emmène dans un ovni cinématographique au comble de sa poésie, dans une histoire empreinte à la fois d'humour et de noirceur. Tout s'enchaîne comme dans une partition, chaque image fonctionnant telle une note qui en appelle une autre. Evoluant de fil en aiguille, l'image et le son nous tissent une toile infinie, créant, trouvailles après trouvailles, des liens surprenants qui nous font par exemple passer d'une boule de jeu de quille à un gros plan d'énormes testicules de porc !
Le sujet est une série de crimes, pourtant c'est bien de la vie dans sa globalité dont nous parle Pálfi. La mort n'est ici qu'un événement parmi d'autres, rythmant la vie du monde qui nous est offert à voir et à entendre. La caméra s'attarde tour à tour sur des hommes et des femmes, jeunes et vieux, mais aussi sur une quantité incroyablement variée d'espèces animales (du serpent à la taupe en passant par la coccinelle, le chat ou encore la cigogne) et végétales (muguet, arbres, etc). "Hic" est aussi régulièrement parsemé de sublimes très gros plans, nous montrant les détails de cette vie si diversifiée, jusqu'à la rendre parfois presque abstraite.
Mais finalement tout contribue à faire du spectateur le principal enquêteur dans une histoire complexe dépourvue de dialogues où chacun doit se fier à sa propre perception des images et des sons. Un fascinant jeu de piste où fourmillent les indices, à mille lieues de ces films américains où le spectateur n'est qu'un œil voyeur complètement manipulé par l'investigation des personnages principaux. Ici pas de personnage principal, si ce n'est nous-même !
Raphaël JullienEnvoyer un message au rédacteur