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L'HEURE D'ÉTÉ

Un film de Olivier Assayas

Laisser le passé derrière soi

Au milieu de l’été, deux frères et une soeur, avec leurs familles respectives, fêtent les 75 ans d’Hélène, dans la grande demeure familiale, aux objets de grande valeur, ayant appartenu à leur grand oncle, le célébre peintre Paul Berthier. Quelques mois plus tard, Hélène disaparaît…

On savait que Téchiné était capable de filmer l'été comme personne. Voici que Assayas (« Boarding gate », « Demonlover », « Les destinées sentimentales »), lui emboîte le pas, en donnant à ses vingt premières minutes de film, une chaleur et une réalité intemporelles et une intimité toute familiale. Passant avec naturel d'un personnage à un autre, d'un sourire crispé à un rire franc, d'une complainte relative à un coup de colère franc, le réalisateur se coule en douceur dans cette famille élargie, au passé célèbre et envahissant, que les plus jeunes semblent oublier. Seul Berling semble réellement attaché au culte que sa mère voue à l'oncle, qui pourrait bien avoir été son amant.

Si le personnage de Binoche râle après les non-dits qui sclérosent la famille, c'est surtout dan la seconde partie du film qu'apparaissent des tensions toutes naturelles, autour des décisions à prendre quant au devenir de la maison. La vie moderne reprend le dessus, avec ses contraintes temporelles comme géographiques (deux des enfants vivent à l'étranger), et les projets personnels se font jour, nécessitant une liquidation aveugle des traces du passé. Et peu à peu, les sentiments véhiculés par le personnage de Berling prennent le dessus, jusqu'à l'adieu à la maison, troisième partie du film, sous forme de grand déballage des biens.

Le symbole des vases signés Félix Braquemond, valeurs oubliées (voire ignorées) d'une famille dont l'explosion est annoncée, prend alors tout son sens. A l'image de la fille de Berling, apparente ingénue sans cervelle, en pleine crise d'adolescence, on regrette tout ce qui aurait pu se passer ici, dans cette maison déjà vendue, siège d'une dernière fête, celle de la génération d'après, celle qui ne connaîtra peut être pas la douceur de ces lieux de réunion et de partage. Un beau film, dont la nostalgie qui fait forcément se poser bien des questions, quant à sa propre attitude vis à vis de la mémoire familiale.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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