HANNAH ARENDT
Une prise de position nécessaire, desservie par un film formellement rébarbatif
Le problème avec le nouveau film de Margarethe Von Trotta, c'est que l'on voit très vite où l'auteur de "Les années de plomb", "Rosa Luxemburg" et "Trois soeurs" veut en venir. Et il est vrai qu'entre le voyage vers un passé enfoui que le procès permet à la philosophe d'effectuer, et le point de vue qu'elle va adopter sur l'homme et le nazisme, ce fait historique avait de quoi captiver. D'autant qu'il interroge d'un côté sur la responsabilité passée de certains responsables juifs dans la mise en place de la « solution finale », et de l'autre sur la capacité du peuple d'Israël à la moindre auto-critique, hors de la parole officielle liée à la Shoah.
Oui mais voilà, la réalisatrice choisit de s'intéresser à la description de salons New Yorkais, et à un milieu universitaire et journalistique étriqué, oubliant de consacrer un réel temps à l'Histoire. Elle se contente, pour évoquer les exactions du criminel nazi, fonctionnaire obéissant, d'une ennuyeuse reconstitution du procès, mêlée de quelques images du vrai événement. On y voit quelques instants Barbara Sukowa, dodeliner, froncer les sourcils par interrogation, et prendre des notes. Cinématographiquement parlant, l’encéphalogramme est désespérément plat.
On est certes par moments séduit par la description de la complicité entre la femme et son compréhensif mari, mais les discussions de la première partie n'invitent pas non plus à l'inventivité. Reste que le discours de Hannah Arendt sur la « banalité du mal » est forcément troublant et dérageant, constituant finalement le seul intérêt de ce film statufié, dans lequel Barbara Sukowa fait, elle, plutôt bonne figure.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur