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GRAVITY

Un film de Alfonso Cuarón

Une immersion totale

Le docteur Ryan Stone, experte en ingénierie médicale, est chapeautée par l’astronaute Matt Kowalsky, lors de sa première sortie dans l’espace. Peu en forme, elle tente cependant de faire son boulot avec précision, alors qu’une pluie de débris approche. N’ayant pas le temps de rentrer dans la navette, ils sont alors victimes d’un accident qui les isole dans l’espace…

Prenez votre respiration, agrippez les accoudoirs de votre siège, vous voilà partis pour une heure trente de montagnes russes, expérience bluffante d'une immersion dans un vide profond, faisant ressentir autant des sensations de vertige ou d'angoisse, qu'un profond besoin d'humanité et de contact. Film d'ouverture de la dernière Mostra du cinéma de Venise (la 70e), la nouvelle œuvre du Mexicain Alfonso Cuarón, plus de sept ans après le mémorable "Les Fils de l'homme", aura donc mérité son interminable attente.

Il faut dire que le résultat est tout bonnement stupéfiant. Cuarón nous embarque tout en douceur dans ce monde ceinturé d'obscurité, ayant pour seuls points de repère une Terre d'une beauté limpide et une navette refuge, à la fois à portée de main et nécessitant précision et doigté pour pouvoir la rejoindre. Il nous immerge dans ce monde du silence, plus grand que l'Homme, grâce à un plan-séquence d'ouverture magistral, qui se termine sur le terrible accident, qui nous cloue définitivement à notre siège.

Jouant de l'alternance entre moments de tension et accalmies nécessaires, l'auteur s'amuse avec nos nerfs et nous tient en haleine pendant 90 minutes, autour de l'instinct de survie de ses deux uniques personnages. Il maîtrise ses mouvements de caméra, celle-ci s'adaptant constamment à l'absence de repères et de gravité, passe ponctuellement à la caméra subjective pour mieux donner à ressentir l'oppression et à voir l'infini, et utilise la 3D avec une efficacité rarement égalée.

L'aventure est au rendez-vous, l'horreur aussi (la récupération du troisième astronaute, la tête transpercée par un débris), ainsi qu'un certain humour, mais la surprise vient de la construction d'un récit centré sur l'homme, ou plutôt la femme, puisque "Gravity" est surtout l'histoire du drame intime du personnage de Sandra Bullock. Alfonso Cuarón en profite pour donner à son film une portée universelle, montrant certes la petitesse de l'être humain face à la nature, mais rendant hommage à la persévérance et à l'instinct de survie, et montrant que celui-ci est toujours malgré tout relié à la terre et donc à la vie, devant un jour ou l'autre finir par retrouver un certain équilibre.

Le parallèle entre la vie privée et le destin de l’héroïne prend progressivement forme, le metteur en scène usant avec parcimonie d'une symbolique puissante (le cordon ombilical, la position du fœtus, le liquide amniotique dont on ressort, plus fort...), incarnant une idée de renaissance à la vie. Spectacle total à émotion diffuse mais réelle, "Gravity" mérite tous les éloges, et ne devrait être vu avant tout qu’en trois dimensions, pour mieux vivre cette immersion toute aussi intime que grandiose.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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