FRIED BARRY
Un premier long aussi déjanté que maîtrisé
Un junkie vivant en Afrique de Sud se fait kidnapper par un extraterrestre. L’extraterrestre se sert du corps de Barry comme d’un hôte et va parcourir les rues de Johannesburg, découvrant les plaisirs de la drogue et de la chair, dans un monde de la nuit aux règles incompréhensibles…
"Fried Barry" est le premier long-métrage du clipper Ryan Kruger et c'est une folie. Une folie furieuse qui dure 99 minutes. 99 minutes de pure hérésie délirante, faite de grimaces, de sexe, de néons, de mouvements de caméra impossibles à travers des foules en délire, de total surjeux de personnes complètement soumises à leurs pulsions les plus basiques : une prostituée, un mac, un fou, un travesti sur le bord d'une route, un vendeur de fromage, une caissière, et tant d'autre. Personne n'est sein d'esprit et personne ne se rend compte que notre junkie favori n'est plus vraiment lui-même. Son regard fixe, ses mouvements saccadés éveillent le désir et non la crainte.
Dans le même esprit que "The Wave" de Gille Klabin, ce film joue sur l'étrange et le différent que provoque la drogue. Mais ce qui est si drôle et si jouissif dans "Fried Barry", outre l'incroyable performance de Gary Green, c'est qu'il devient une figure de l'autre, un observateur surpris qui tente de comprendre les règles et le monde qui l'entoure. Un monde ultra violent, sale et dépressif qui est complètement tenu à distance par ce grand corps grimaçant. Rien ne se règle, rien n'avance, sur les quelques jours que dure l'intrigue et Barry n'est jamais vraiment acteur, il se laisse porter, et ça fait aussi peur que rire.
Bon à savoir, ce film n'avait pas de scénario mais a été improvisé au fur et à mesure en fonction des acteurs disponibles. Les tribulations de Barry se prêtent parfaitement à ce type d'écriture et c'est un véritable défi de mettre dans l'ordre ses déplacements et ses actions quand vous sortirez de la séance ! On retiendra en particulier quelques répliques cultes, du même niveau que le « write a book about what !? » de "Wrong Cops" de Quentin Dupieux : « do you want my cheese ? ». Dérangeant, drôle et fou, cette comédie sous acide est un voyage dans le monde de la nuit dont personne ne peut ressortir indemne.
Thomas ChapelleEnvoyer un message au rédacteur