LA CHANCE SOURIT À MADAME NIKUKO
Un joli portrait de mère
Nikuko est une femme de 1m51 pour 87 kilos. Bonne vivante, elle est toujours tombée amoureuse des mauvais garçons, qui ont toujours profité de son argent. Installée dans un village de pêcheurs, elle est cuisinière et vit sur un bateau, avec sa fille Kikurin, devenue adolescente. Cette dernière va commencer à s’intéresser à un garçon étrange, adepte de grimaces qu’elle seule peut voir…
Invité de dernière minute du Festival d’Annecy 2021, parmi les séances spéciales, "Fortune favors lady Nikuko" (traduire "La chance sourit à madame Nikuko"), le nouveau film du réalisateur de "Les enfants de la mer", est avant tout le portrait d’une femme. Une mère, amoureuse de la nourriture, qu’elle cuisine pour les autres ou pour sa fille (qui en salive à chaque fois que quelque chose lui évoque un de ses plats...), mais aussi facilement séduite par des hommes peu scrupuleux. Tout le contraire de la sérieuse Kikurin, adolescente, au travers des yeux (et des paroles en voix-off) de laquelle leur existence est relatée.
Le graphisme, un peu plus simple pour les personnages, possède des décors aux nombreux détails, marquant l’usure des lieux (rouille, lianes, mousses, fissures...) et fait la part belle aux couleurs pastels. Quant au scénario, adapté du roman de Kanako Nishi, il navigue entre des soucis d’adolescents (amitié entre filles, sentiment de différence ou d’exclusion, premier intérêt pour l’autre sexe...) et les rapports entretenus avec une mère dont elle épingle tendrement tous les petits défauts (la gourmandise - on la voit ponctuellement comme un bibendum en chocolat, son manque gênant d’énergie lorsqu’elle participe à une compétition sportive, ses difficultés avec les rouleaux de scotch, son enthousiasme fanatique pour un pingouin captif...).
Derrière tout cela se cache une vraie tendresse pour cette femme, dont elle dissèque les moindres gestes ou habitudes (pomponement soudain, coups de fils nocturnes...), à la recherche d’un possible secret. Globalement la tonalité de ces chroniques du quotidien est très plaisante, alignant des traits d’humour certes plus ou moins fins, et faisant la place notamment à des réflexions incongrues de la part des animaux croisés par l’héroïne auprès du temple local. De quoi éveiller une réelle empathie envers ses deux personnages principaux et provoquer sur le tard une réelle émotion.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur