FILS DE
HPG : Hardeur, Père, Guignol
Alors qu’il s’apprête à commencer le tournage de son nouveau film de fiction, Hervé découvre, médusé, son fils en train de faire ses premiers pas. Pour Gwen, sa compagne, c’est l’occasion de mettre Hervé au pied du mur : soit il continue seul sa vie d’acteur-réalisateur porno minable, soit il prend ses responsabilités et devient un cinéaste traditionnel et un papa normal. Sans regret, il décide de tout arrêter et laisse son équipe en plan pour tourner un documentaire improvisé sur sa paternité. Caméra à la main, il se met à interroger ses proches pour l’aider à trouver une réponse : comment être un bon père ?
Le cinéma traditionnel made by HPG est une énigme encore irrésolue, suscitant aussi bien la surprise que l’irritation. En trois films, le célèbre pornographe et pionnier du « gonzo » est presque devenu le pendant masculin d’Ovidie, exploitant son statut de figure du cinéma X à des fins plus ou moins réflexives. Mais pour quel résultat ? Jusque-là, que du banal, à vrai dire : d’une réflexion plus kamikaze que franche sur l’envie de quitter le X pour percer dans le traditionnel ("On ne devrait pas exister") jusqu’à un curieux portnawak à la Marco Ferreri ("Les mouvements du bassin"), en passant par un génial documentaire sur les véritables coulisses du porno-gonzo ("Il n’y a pas de rapport sexuel", réalisé par Raphaël Siboni), le cinéma selon HPG se veut au carrefour de l’autofiction et du cinéma d’auteur. Bonne idée, mais hélas, il faudrait peut-être lui rappeler qu’insuffler un impact stylistique et auteuriste dans une œuvre de cinéma ne s’effectue pas au travers des codes visuels du cinéma porno (en gros, un caméscope HD ne remplace pas une vraie caméra).
Le souci central de ce troisième long-métrage réside hélas dans son postulat de départ : un acteur-réalisateur de films X se retrouve confronté à son rôle de père et improvise alors un documentaire sur ce sujet. Dans l’idée, la mise en abyme vaut ce qu’elle vaut, mais le symbole qu’elle entretient entre les deux facettes de son auteur-réalisateur (tiraillé entre le cinéma porno et le cinéma traditionnel) ne lui est bénéfique en aucun cas sur la longueur. On ne mettra même pas un quart d’heure à en prendre la mesure, le film se révélant trop brouillon dans sa narration et à la limite du gâchis exaspérant, raccordant ses séquences à travers des cuts brutaux et injustifiés, sabordant les scènes dramatiques là où on les aurait voulues plus fluides et rallongées, et ne laissant jamais ses seconds rôles prendre le dessus. Outre un Christophe et une Izia Higelin venus faire un petit coucou sans intérêt, on aurait préféré que HPG se mette sur un pied d’égalité avec le personnage de la mère, incarnée par sa propre compagne Gwenaëlle Baid.
On a surtout l’impression d’assister à un vague journal intime filmé un peu à la hussarde, autocentré sur un grand gaillard chauve, assez instable dans son comportement, souvent difficile à suivre dans son raisonnement, et parfois assimilable lui-même à un gros bébé (plan rigolo : HPG avec une tétine dans la bouche !), qui se sent même obligé de faire appel à quelques collègues de la profession (dont Nina Roberts, ex-star du X) pour surligner la difficulté de concilier le travail de hardeur avec l’activité de pilier d’une structure familiale. Sur ce dernier point, on précisera que cela n’a rien d’un scoop (quelques documentaires, dont un signé Ovidie, ont déjà abordé le sujet plus en profondeur), et que surtout, les scènes filmées par HPG (discussion conjugale, préparation du biberon, etc…) sont d’une banalité sans nom, et sont de plus élaborées et découpées avec un manque absolu de forme (on insiste). Même après trois tentatives, HPG n’est pas encore un vrai cinéaste, il n’est juste que la marionnette de son propre théâtre. Au risque de finir par s’emmêler gratuitement dans ses propres fils…
Guillaume GasEnvoyer un message au rédacteurBANDE ANNONCE