#FEMALE PLEASURE
Appel à la déconstruction
Partout dans le monde, le sexisme et le patriarcat s’en sont pris au corps des femmes, à leur liberté et à leur sexualité. Aujourd’hui, sur tous les continents, des femmes se lèvent contre ces injustices et réclament leur droits…
Barbara Miller, avec ce documentaire, met fin aux querelles de chapelles. Le mot féminisme n’est quasiment jamais employé ici. Le sujet n’est pas une appartenance politique, un combat, mais un message qui s’adresse à toutes les femmes, car toutes les femmes, partout dans le monde, sont les victimes des différentes systèmes, religieux et politiques, qui les oppriment. Cinq femmes se font ici l’écho d’une humanité entière, cinq femmes dont la lutte porte sur des actions précises. Elles sont toutes très différentes et toutes dénoncent un système à travers leur expérience.
Deborah Feldman se bat pour dénoncer les pratiques de la communauté juive-orthodoxe des États-Unis. Leyla Hussein, une somalienne qui vit aujourd’hui à Londres, se bat pour éradiquer l’excision. Rokudenashiko, par son art, questionne le primat culturel et politique du pénis dans son pays et au-delà. Doris Wagner, ancienne sœur abusée, s’attaque au dogme de l’Église et vient en aide aux personnes victimes de violence dans ce cadre. Et Vithika Yadav, avec sa plateforme Love Matters, lutte pour un changement des mentalités autour des relations hommes-femmes en Inde. Ces cinq femmes ont été filmées dans leurs luttes quotidiennes. Elles racontent dans un premier temps leur histoire, puis présentent les différents dispositifs qu’elles ont mis en place pour informer et éduquer. Elles témoignent également de l’effet qu’ont leur lutte sur leur vie personnelle, avec par exemple Leyla Hussein qui doit tenir son adresse secrète ou Rokudenashiko qui a été arrêtée en raison de sa pratique artistique.
C’est ce mot « éducation » qui est au cœur du film. Chaque portrait est un témoignage à but informatif, et c’est ce que répète chacune d’entre elles. Par leur actions, elles remettent en cause des systèmes oppressifs tellement ancrés dans les mentalités, qu’ils apparaissent comme naturels. Elles révèlent comme choquantes des pratiques automatiques. Sans jamais diaboliser les agresseurs ou les garants de ce bon système, sans jamais culpabiliser les personnes qui les perpétuent, ces femmes poussent à la réflexion, à ouvrir les yeux, à l’image des jeunes britanniques auxquels Leyla Hussein fait une démonstration de ce en quoi consiste une excision. Ils en ressortent choqué, le spectateur aussi.
Ce film est terrifiant, car il montre à quel point, dans la quotidienneté et dans la justice, le système est activement anti féminin, à quel point, au cours de l’Histoire, les femmes ont été systématiquement dépréciées et leur corps attaqués. Ce film a enfin l’intelligence, quand il s’attaque aux dogmes islamique, chrétien, hindouiste, judaïque et bouddhiste, de citer, avec référence, les textes. Il ne s’agit donc pas de l’affabulation de femmes hystériques, mais bien de réalités sociales, culturelles, politiques et religieuses. Des pratiques connues et reconnues de tous, de systèmes activement misogynes, sans que personne n’y pense. Pour ne prendre qu’un exemple, si les femmes doivent se couvrir, c’est parce que les hommes sont incapables de se maîtriser, elles troubleraient la quiétude de leur esprit. Mais si le masculin est à ce point esclave de ses désirs et incapable de se contrôler, est-il vraiment le sexe fort, est-il le responsable, le sachant, l’être supérieur qu’il prétend être ? ...
Thomas ChapelleEnvoyer un message au rédacteur