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Attention, bien que Werner Herzog fasse des documentaires, que ce film ressemble à un documentaire, que le protagoniste, Yuichi Ishii, joue son propre rôle et que la plupart du film ait été tourné sans autorisation, en une prise, la caméra à l’épaule, il ne s’agit pas d’un documentaire. C’est une fiction, une restructuration de la réalité dans un certain but : la mise en abyme du faux et une réflexion sur la réalité des émotions suscitées par la facticité.

Ce film est une série de situations professionnelles dans lesquelles se retrouvent Yuichi Ishii, cet entrepreneur des temps modernes, dont la société propose la location d’acteurs sensés incarner, le temps d’un événement, un ami ou un proche. Si les clauses du contrat prennent cette forme, circonscrite dans l’espace et le temps, elles sont parfois un peu différentes, comme pour une dame qui veut revivre le jour de sa victoire à la loterie, ou cas plus problématique, celui d’une mère célibataire qui veut que sa fille de 12 ans ait un père dans sa vie.

C’est de cette dernière histoire, et de la répétition des rendez-vous entre la jeune Mahiro et le professionnel Yuichi, que le trouble va naître, chez lui et chez le spectateur. Malgré la distance imposée par son habitude du métier, il se laisse peu à peu attendrir, il commence à s’attacher à la jeune fille, jusqu’à la serrer dans ses bras, contact impensable culturellement.

Sur les notes de Schubert, ces images désincarnées et flottantes sont chargées d’une étrange épaisseur conférée par leur réalité. Les voir au cinéma est d’autant plus déstabilisant : Herzog fictionnalise une illusion et pourtant, bien que nous soyons, comme les clients de Yuichi, conscients de la supercherie, les émotions que nous procurent ces histoires sont bien réelles.