FAHRENHEIT 9/11
Une palme d'or politique et combative
La politique étrangère américaine post 11 septembre 2001 vue par Michael Moore. Entre un président incapable, qui passe son temps en vacances, et une administration qui manipule l’opinion pour imposer la guerre en Irak…
On peut reprocher aux documentaires de Michael Moore (The big one, Bowling for Columbine), de poser plus de questions qu'ils ne donnent de réponses. Fahrenheit 9/11 ne déroge pas à la règle, mettant le nez dans les questions qui fachent. Pourquoi les voix des noirs américains de Floride qui auraient fait basculer le résultat de la dernière élection présidentielle n'ont pas été décomptées ? Est-ce parce que le gouverneur de Floride était du camp Bush ? Pourquoi l'administration Bush a-t-elle organisé la fuite de membre de la famille Ben Laden au lendemain des attentats du onze septembre ?
Michael Moore explique, certes schématiquement, les liens entre les familles Bush et Ben Laden. Il met également à jour les nombreux intérêts économiques en jeu dans la guerre en Irak (pétrole, armes, fourniture logistique et alimentaire). Et on apprend beaucoup, sur l'état d'esprit des troupes sur place, sur l'utilité de la guerre, sur le dégoût de certains marine's, payés deux fois moins cher qu'un conducteur de camion privé, qui livre la nourriture aux soldats, une fois par jour.
Certains reprocheront à Michael Moore de faire de la propagande. Il n'a fait qu'utiliser les armes de ses ennemis ou détracteurs : la mise en scène choc, la simplification du propos, et l'utilisation de slogans visent l'efficacité. Et là où le documentariste est devenu très fort, c'est qu'il ne s'attaque jamais à l'armée, montrant même un certain respect envers les appelés. Certes, les ressorts de la réalisation sont moins variés que dans Bowling for Columine, où Moore utilisait même le dessin animé, mais le film a le mérite de mettre son metteur en scène moins en avant.
Son don de la provocation le pousse à aller à la rencontre d'élus du congrès, pour leur demander d'envoyer leurs fils en Irak. Bien entendu, aucun n'accepte, un seul étant déjà sur place. Démonstration par l'absurde, qu'il renforce encore par l'interview d'une mère patriote, dont le plus jeune fils sera tué, pour rien… Fin stratège jusqu'au bout, usant d'une musique sourde installant une tension progressive et efficace, Michael Moore réussit à s'effacer et à faire dire, au travers d'une lettre d'un soldat décédé, ce que lui voudrait dire : « j'espère que ce crétin ne sera pas réélu ». Le message est clair, le film brillant, et la Palme d'Or… surtout politique.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur