EN ROUE LIBRE
Dérapage contrôlé
Louise se retrouve un jour complètement bloquée dans sa voiture, incapable de mettre un pied dehors sans être en proie à des crises de panique. Paul s’emploie à voler ladite voiture, kidnappant en prime involontairement son occupante. Muni d’un pistolet, Paul veut aller au Cap Ferret dans le but de venger la mort de son frère. Un road trip improvisé à travers la France commence alors…
"En roue libre", premier long métrage de Dider Barcelo, repose sur une idée : filmer l’intégralité d’une histoire dans une voiture. Le pitch en lui-même a de quoi intriguer : comment le réalisateur allait-il bien pouvoir s’y prendre pour réussir à se renouveler en 1h30 de film ? La réponse, quelque peu décevante, est rapide : il n’y parvient malheureusement pas.
"En roue libre" est un film qui ravira les amateurs de pare-brises, de Volvo vintage et de plans de drones. Pour le reste, Dider Barcelo applique ici une recette bien rodée tournant autour de trois types de plans : champ/contre champ sur Marina Foïs et Benjamin Voisin, plan des deux à travers le pare-brise, et recommencer jusqu’à épuisement. Cette répétition dans la mise en scène s’accompagne d’une série de situations assez attendues, à l’image de la conduite de nos deux protagonistes paumés, semblant rouler de manière de plus en plus sereine à mesure qu’ils s’avancent sur l’autoroute du soleil. Nos deux amis (car oui, tout les séparent et pourtant…) font, sur le chemin, toutes sortes de rencontres, allant du loufoque (l’auto-stoppeuse électrosensible qui semble les attendre à chaque coin de rue) au gênant (le camp de gitans qui les acclame à la manière des Congolais de « Tintin au Congo »), et nous laissant dans son ensemble une sensation de bouches trous dans cette histoire dont on semble pouvoir deviner la fin au virage.
Quelques petites nuances, toutefois. "En roue libre" possède cependant des petits instants de grâce qu’il est important de saluer : Marina Foïs et sa franchise qui semble toujours venir du cœur, si dangereuse soit la situation ; Jean-Charles Clichet dans son rôle de psy, qu’on soupçonne jusqu’au bout d’être en fait gastro-entérologue ; et toutes les scènes qui découlent de ces moments de thérapies improvisées dans lesquels les personnages s’ouvrent enfin, ce qui permet d’emmener le film dans un autre registre. Comme cette scène où Paul (interprété par Benjamin Voisin) se demande, peut-être pour la première fois de sa vie, ce à quoi pourrait ressembler son futur.
"En roue libre" parvient ainsi, grâce à un dérapage contrôlé salvateur constitué de petites trouvailles de scénario et d’un bon jeu d’acteurs, à éviter le mur dans lequel il semblait pourtant foncer.
Amande DionneEnvoyer un message au rédacteur