EL AGUA
Des croyances irrationnelles bien pratiques
A Orihuela, un village du sud de la communauté de Valencia, en Espagne, les jeunes tuent le temps d’un été caniculaire, en fumant, dansant ou draguant. Ana et José ont une histoire d’amour. Mais une nouvelle tempête risque de faire déborder à nouveau la rivière…
"El Agua", premier long métrage d'Elena Lopez Riera, passé par la Quinzaine des réalisateurs, a quelque chose de languissant, à l'image de ces jeunes que suit l'intrigue, désœuvrés sous la chaleur de l'été, coincés dans un petit village où l'eau vient souvent à manquer. Ayant tourné dans le village dont elle est originaire, Orihuela, au sud de la province d'Alicante, la réalisatrice, qui a réalisé un casting sauvage sur place, est partie d'une légende locale, qui veut que la rivière, amoureuse, puisse emporter certaines femmes dans ses eaux, surtout si celles-ci tombent elles-mêmes en amour… d’un autre. Une croyance qui installe une ambiance sourde de crainte, transmise de mère en fille, et contre laquelle va finir par se révolter le personnage principal.
Avec une menace de tempête allant crescendo au fil du métrage, images d'infos venant de plus au nord et petits gestes préventifs signalant l'imminence de l'événement, c'est pourtant la découverte d'une liberté amoureuse qui est ici développée. Le personnage d'Ana, 17 ans, d'une beauté qui pourrait bien séduire quiconque (et donc la rivière), complice avec sa grand mère considérée plus ou moins comme une sorcière, tout comme celui de sa mère (toujours formidable Bárbara Lennie, vue dans "El Reino" ou "La Niña de Fuego"), vont oser s'opposer aux hommes, et braver cette sorte d'interdit qui associe l'amour à l'eau, et par ricochet le sexe et un certain danger. Aussi troublante qu’une chaleur torride, cette parabole sur les aspects contraints d'une jeunesse qui ne demande qu'à s'émanciper s’avère des plus convaicantes.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur