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DIVERTIMENTO

J'irai au bout de mes rêves, tout au bout de mes rêves

Alors qu’elle est dans sa chambre d’un appartement de banlieue en pleine Seine-Saint-Denis, la petite Zahia entend un soir la télévision du salon. Attirée par la musique qui caresse ses oreilles, elle traverse le couloir et rejoint ses parents hypnotisés par le petit écran où un chef d’orchestre dirige ses musiciens sur le Boléro de Ravel. Zahia rêve alors émerveillée de devenir à son tour cheffe d’orchestre…

Divertimento film movie

Coup sur coup, deux longs métrages proposent leur version autour du thème du chef d’orchestre, femme qui plus est. "Tár" de Todd Haynes avec l’impressionnante Cate Blanchett et "Divertimento" de Marie-Castille Mention-Schaar avec la jeune Oulaya Amamra. La comparaison entre les deux films s’arrêtera là ! Le septième long métrage de la réalisatrice des "Héritiers" retrouve la fougue et l’inspiration de ses précédentes œuvres qui prennent place au lycée, avec de jeunes adolescents, et qui montrent qu’un monde meilleur est possible. "Divertimento" est un film aussi divertissant qu’émouvant sur deux sœurs qui se battent pour que leurs rêves deviennent réalité, alors qu’au départ elles partent avec de sérieux handicaps. Habitant en banlieue dans le 93, issues d’une famille algérienne aux moyens limités, les deux sœurs jumelles doivent aussi faire face au machisme et au sexisme des mâles dominants dans le milieu de la musique en général et des chefs d’orchestre en particulier.

On pourrait croire que les clichés puissent assommer rapidement le film, mais "Divertimento" est globalement finement écrit et hormis certaines maladresses et caricatures (notamment au début au lycée Racine, avec le groupe scolaire qui compose l’orchestre), la magie opère. Et on se laisse emporter par la partition de cette histoire, qui rappelons-le, est tirée d’un fait (encore) bien réel, ce qui donne davantage de poids à l’émotion qui peut se dégager de chaque scène et de l’évolution des personnages. Quelle bonne idée d’avoir aussi travaillé astucieusement sur le son pour donner encore plus de coffre au film. C’est le cas ainsi pour les nombreuses répétitions de l’orchestre enregistrées en live et plus subtilement des airs et des rythmes du quotidien qui enchantent la vie de Zahia et montrent à quel point la musique c’est tout simplement sa vie !

Les comédiens sont quasiment tous parfaits. Les jumelles interprétées par Oulaya Amamra ("Le Monde est à toi", "Divines", "Tamara") et Lina El Arabi ("Les Meilleures") irradient l’écran. Niels Arestrup ("Quai d’Orsay", "Un Prophète") tient le rôle idéal du maestro sévère et bienveillant. Zinedine Soualem marque durablement les esprits en composant cette figure paternelle forte, qui prouve que l’éducation (un thème cher à la réalisatrice) ne se fait pas uniquement en classe. Son personnage montre ainsi qu’en élargissant le spectre de la culture ou en inculquant de l’ouverture d’esprit à ses enfants dès le plus jeune âge, on bâtit une force intérieure et une volonté de fer permettant de se battre et d’arriver à toucher les étoiles. Le point faible du casting réside cependant dans le fait que quelques comédiens ont davantage été choisi pour leur connaissance musicale, moins pour leur talent d’acteur.

Si le métrage manque parfois de souffle et d’intensité, en comparaison à ce que savent si bien le faire les Anglais avec leurs grandes comédies sociales ("The Full Monty", "Les Virtuoses"), "Divertimento" reste, au final, un joli film avec une belle histoire (vraie) sur l’universalité de la musique. Une musique qui rassemble les communautés, les quartiers et les générations. Tout est dit dans cette jolie scène centrale où Fettouma participe à un atelier musical dans son propre quartier et apprend à une jeune femme trisomique comment jouer du violoncelle grâce à un système de gommettes de couleurs. "Divertimento", c’est une belle leçon d’humanité et d’accomplissement de ses rêves, pour lesquels il faut sans cesse se battre et relever ses manches. Un message simple, fort, efficace et si vrai…

Mathieu PayanEnvoyer un message au rédacteur

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