DES GENS BIEN
Une désagréable absence de cinéma
Deux bras-cassés braquent une banque. Pour prendre la fuite, ils réquisitionnent une voiture. Une fois arrivés à leur planque, ils réalisent que la petite Paloma était à l’arrière. Avant de se mettre au vert, ils pensent ramener la petite au commissariat, mais se rendent alors compte que celle-ci est maltraitée par ses parents. Ne pouvant se résoudre à la rendre à ses bourreaux, ils décident de l’emmener avec eux dans leur fuite…
Ne pas faire de cinéma, sur l’intégralité d’un long-métrage, pourrait être considéré comme un succès en soi. Le film réussit ce tour de force haut la main. En effet, il parvient, par son absence de direction d’acteurs et sa mise en scène douteuse, à passer à côté de toute émotion, à la fois à l’échelle de la scène, mais aussi à celle du plan (les raccords sont également d’une platitude manifeste). Une émotion qui aurait pourtant pu émerger dans une histoire certes classique, mais prometteuse.
Ce problème vient peut-être du fait que les scénaristes, réalisateurs, producteurs et acteurs principaux sont les mêmes personnes, et que l’actrice qui joue Paloma, soit en fait la fille de l’un d’entre eux. Dans l’absence de regard extérieur et fonctionnant en vase clos, les deux hommes se sont sans doute perdus. Les personnages souffrent ainsi tous d’un manque de profondeur et leurs motivations ne sont jamais vraiment définies. Une hypothèse d’interprétation, un peu tirée par les cheveux, serait que le film soit entièrement narré du point de vue de Paloma : la petite fille, persécutée, se serait entièrement enfermée dans son monde avec Paco, son ami imaginaire et aurait inventé les deux bandits maladroits. Dès lors, sous la forme d’un rêve, d’une fable, le film, vide de toute caractérisation, ne serait qu’un récit onirique d’une jeune fille qui tente d’échapper à la violence.
Cette hypothèse, qui justifierait la forme si étrange du film, ne trouve hélas, pas d’ancrage dans le métrage lui-même. Il s’agit d’un film au premier degré, dont certains éléments de mise en scène, comme la porte qui se ferme toute seule, marquant la présence de Pablo, vide l’oeuvre du peu de mystère qu’elle renferme. Au final, ce film est en quelque sorte une fable racontée à un enfant par quelqu’un ne sachant pas bien raconter et ne pouvant pas vraiment proposer de belles images, ou des images en accord avec sa narration.
Thomas ChapelleEnvoyer un message au rédacteur