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DÉBÂCLE

Un film de Veerle Baetens

À la faveur de l’été

Après de nombreuses années, Eva retourne dans son village natal. Mais si elle revient dans sa région d’origine, ce n’est pas pour retrouver d’anciennes connaissances, mais bien pour régler ses comptes…

Pour beaucoup de cinéphiles, la découverte de Veerle Baetens s’est faite devant un mélodrame bouleversant, un récit d’amour déchirant dans lequel elle tenait le premier rôle. "Alabama Monroe" a déjà plus de dix ans, et la comédienne a décidé de passer derrière la caméra avec un long-métrage tout aussi poignant. Dans cette adaptation d’un succès littéraire flamand, il est question d’un traumatisme enfoui, d’un drame vécu par la protagoniste durant un été adolescent. Mais comme les récents "Un Silence" et "Le Successeur", une grande partie de l’intérêt de l’expérience de visionnage réside dans le malaise de la révélation, dans le choc des images inattendues. C’est pourquoi, le cœur du film sera ici tu.

Avec un scénario parfaitement maîtrisé, peut-être parfois un peu trop mécanique, "Débâcle" nous plonge dans le quotidien d’un petit village, sur deux époques, l’une où la protagoniste affronte les débuts de l’adolescence ; l’autre, une petite vingtaine d’années plus tard, lorsqu’elle décide de retourner sur ses terres natales à l’occasion d’une célébration. Immédiatement, on se doute que les retrouvailles ne seront pas joyeuses, que quelque chose cloche dans cette décision de revenir à l’endroit qu’elle a mis tant d’années à essayer d’oublier. Dans cette œuvre toujours à la bonne distance avec ses personnages, la tragédie n’est jamais loin, se cachant même au creux des joues de ceux qui sourient en façade.

Alors que de nombreux réalisateurs nous ont habitué à conter des épisodes de résilience, Veerle Baetens choisit l’opposé, s’intéressant à une jeune femme qui ne peut fuir ses cauchemars d’enfance tant ceux-ci la marquent encore aujourd’hui. Comment oublier l’impossible ? Sans aucune condescendance ou sadisme, la néo-cinéaste capture le parcours d’une de celles qui n’arrivent pas à relever la tête, à tirer de la force d’un évènement effroyable comme le voudraient les gourous du développement personnel. Durant ces mois ensoleillés, ce n'est pas son innocence qu’elle a perdue, mais toute capacité à se projeter dans un futur, vivant désormais dans un présent sans fin, où les êtres défilent sans qu’ils ne puissent véritablement la connaître.

"Débâcle" s’impose ainsi non pas comme un film de reconstruction, mais comme le témoignage de la longue prise de conscience nécessaire pour se rendre compte que notre candeur ne se rétablira pas. Chronique aiguisée et violente, aussi bien dans les faits montrés que par le silence de ceux qui savaient, ce premier métrage est une vraie réussite, et marque la naissance d’une nouvelle metteuse en scène qu’on louait déjà pour ses choix de projets et ses performances à l’écran. La suite nous donne déjà envie !

Christophe BrangéEnvoyer un message au rédacteur

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