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DE MARTES A MARTES

Un film de Gustavo Triviño

Une histoire originale, desservie par un personnage principal insipide

Juan est passionné de musculation. Tous les matins, avant d’aller à l’usine, il pousse de la fonte à la salle de sport. Mais malgré son impressionnante stature, qui lui vaut le surnom de « colosse », il ne parvient pas à inspirer le respect, supportant quotidiennement les railleries de ses collègues et remarques désobligeantes des clients des soirées privées dont il assure la sécurité une fois la nuit tombée. Une routine qui bascule le jour où il est témoin d’un crime, le conduisant à prendre une décision qui changera sa vie…

Conçu comme un thriller social et psychologique, montrant le basculement qui s’opère dans la tête et dans la vie d’un anti-héros d’aujourd’hui (à savoir un malabar sans cervelle ni charisme), « De Martes a martes » est un film comme on en voit peu. Son originalité n’est pas tant liée à sa structure temporelle -les faits se déroulent sur 7 jours, induisant un compte à rebours qui ne s’avère au final pas indispensable- ou ses parti-pris formels –une lumière grisâtre, comme on en voit tant- qu’à un scénario véritablement surprenant, qui va à contre-courant de ce que le cinéma même « social » nous livre habituellement.

En effet, c’est avec un indéniable talent que le réalisateur argentin nous emmène dans une direction pour nous lâcher la main en cours de chemin (la scène du crime, ahurissante), nous pousse sur une pente avant de nous stopper net (la décision de Juan suite à cela… qui l’aurait cru ?) et de nous faire miroiter des issues avant finalement d’ouvrir une brèche inattendue. Passé la première demi-heure d’exposition de la situation du protagoniste, conventionnelle et misérabiliste (la léthargie dont fait preuve le protagoniste face aux railleries de son patron est d’ailleurs limite crédible), le film parvient donc à nous prendre à rebrousse-poil, flirtant en permanence avec le politiquement incorrect.

Mais si la subtilité de son récit fait sa force, le film échoue là où l’enjeu était finalement le plus important, à savoir dans la définition de son héros. Que Juan soit décrit comme une montagne de muscles sans aucune profondeur intérieure n’est pas un problème. Au contraire, cela participe à la volonté de sortir des sentiers battus et d’ériger en héros un homme qui ne le mérite pas. Pour autant, le personnage pêche vraiment par manque de charisme et de magnétisme. Bien loin d’un Matthias Schoenaerts gonflé aux hormones et pourtant terriblement émouvant dans « Bullhead », l’acteur choisi pour incarner Juan, Pablo Pinto, ne parvient jamais à susciter la moindre fascination. Un handicap qui pénalise le film tout entier, tant il atténue tous les beaux efforts faits pour marquer les esprits. Dommage.

Sylvia GrandgirardEnvoyer un message au rédacteur

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