DE L'AUTRE CÔTÉ DE LA PORTE
Un drame pudique et troublant
Hiroshi, comme tous les soirs après l’école, se rend directement dans sa chambre jouer aux jeux vidéo ou regarder la télévision. Mais un jour, il décida de ne plus sortir de cette pièce…
Hikikomori. Vocable japonais qui désigne ces jeunes qui s’enferment dans leur chambre durant des semaines, des mois, voire des années pour jouer à des jeux vidéo. C’est précisément à ce phénomène qui toucherait près d’un million de nippons que le cinéaste britannique Laurence Trush a décidé de s’intéresser. Obsédé par la thématique de la solitude, comme en atteste le titre de son prochain film "Pursuit of Loneliness", le réalisateur s’empare d’un cas très précis pour l’ériger en allégorie d’une société malade qui refuse d’évoquer ses maux. Mais dans "De l’autre côté de la porte", plus que l’enfermement de ce garçon, ce sont les conséquences désastreuses sur la famille que la caméra va s’efforcer de capturer.
Huit clos familial sobre et sensible, le métrage nous plonge dans la lente dislocation d’une cellule familiale. Dans un noir et blanc élégant et envoûtant, ce drame met le spectateur à distance, préférant le naturalisme au misérabilisme. Les gestes quotidiens, comme le dîner, prennent alors des significations déchirantes, où seul le bruit des assiettes vient rompre un silence pesant. Si la mise en scène minimaliste et le rythme volontairement nonchalant pourrait en rebuter quelques uns, la description minutieuse de cette crise familiale mérite qu’on s’y attarde. Surtout, jamais voyeuriste, "De l’autre côté de la porte" saisit avec brio les valeurs du modèle familial japonnais.
Christophe BrangéEnvoyer un message au rédacteur