Festival Que du feu 2024 encart

DARK TOUCH

Un film de Marina De Van

Enfance meurtrie

Une nuit d’orage, dans la campagne irlandaise, une maison prend vie, les meubles et objets massacrant les occupants. Seule rescapée, le petite Neve (ou Niamh), 11 ans, est recueillie par la police, qui refuse d’entendre son témoignage…

Cinéaste aussi discrète que talentueuse, ancienne collaboratrice de François Ozon (pour qui elle écrivit "Sous le sable" et "8 femmes"), Marina De Van continue d’œuvrer dans un cinéma à la frontière des genres, le fantastique et l’épouvante n’étant jamais très loin de ses obsessions et thématiques extrêmement personnelles. Sans doute écœurée par l’accueil glacial réservé à son précédent film, le très troublant "Ne te retourne pas", la cinéaste quitte le territoire – et la langue – français, et se tourne vers l’Irlande. L’île verte, terre de légendes et de surnaturel, se révèle dès les premières images le lieu idéal pour ce nouveau cauchemar, moins métaphorique, plus frontal, dans la lignée de son premier opus, le très dérangeant "Dans ma peau".

Récit d’une enfance maltraitée, "Dark Touch" marche, et c’est son principal défaut, sur les traces du Carrie de Stephen King (dont on retrouve les ambiances rurales et les études de caractère, de même que les manifestations de télékinésie), sans jamais atteindre (mais était-ce le but ?) la maestria du chef-d’œuvre de Brian De Palma. Heureusement, et contrairement au récent remake, le film de Marina De Van ne dévie jamais de son objectif premier, en montrant comment les traumatismes de l’enfance et les abus des parents peuvent aboutir à la création d’un monstre. Porté par un casting d’inconnus, tous parfaits, et l’extraordinaire Missy Keating, émouvante et glaçante en petite fille détruite, "Dark Touch" prolonge certaines idées et thématiques abordées dans son adaptation télévisuelle du "Petit poucet", mais les plonge dans le grand bain (de sang ?) bouillonnant du cinéma horrifique.

Forte de sa sincérité et de ses envies de cinéma (très belle photographie crépusculaire), Marina De Van déroule son douloureux récit, traversé de fulgurances éprouvantes (la scène du goûter) ou véritablement émouvantes (les scènes avec la psy enceinte), jusqu’à un final aussi terrible que – malheureusement – prévisible, mais qui a le mérite d’aller au bout de sa logique. Un petit film, donc, loin d’être parfait, mais qui prouve toute la singularité et la rareté d’une personnalité aussi attachante que celle de Marina De Van.

Frederic WullschlegerEnvoyer un message au rédacteur

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