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DANS SES YEUX

La puissance des regards

Benjamin Esposito est fraichement retraité de son poste d’adjoint au juge. Il prend la décision d’écrire un livre sur une affaire de viol non classée sur laquelle il a enquêté il y a plus de vingt-cinq ans. Toujours hanté par cette histoire, Benjamin va faire appel à sa mémoire, afin de recoller les morceaux…

Après avoir raflé deux prix à Beaune et être passé devant « Un Prophète » et « Le ruban blanc » pour l’Oscar du meilleur film étranger, « Dans ses yeux » sort enfin en France. Véritable phénomène en Argentine, resté à l’affiche onze semaines consécutives en salles, on était en droit d’être impatient de découvrir ce qui a passionné l’Amérique.

« Dans ses yeux » combine, dans un parfait dosage, deux genres particulièrement appréciés du grand public : l’enquête policière et le mélodrame romantique. Coté polar, Campanella plonge le spectateur dans une sordide histoire de viol qui mène à une chasse à l’homme haletante. Toute la puissance de « Dans ses yeux » tient ainsi en quelques scènes magistralement exécutées dont une incroyable course-poursuite filmée en plan séquence et une scène d’interrogatoire à couper le souffle. En plus de la forme, ce versant se paye le luxe de questionner les concepts de justice et de punition en soulevant de véritables arguments jusqu’à un final renversant.

A coté de cette enquête rondement menée, se dévoile une histoire d’amour qui n’a jamais aboutie pour des raisons d’origines sociales divergentes. Les regrets sont palpables à chaque souvenir d’Esposito. L’indicible passion entre Benjamin et Irene se ressent par l’intense jeu des regards entre Ricardo Darin et Soledad Viallamil, qui a plus d’impact que n’importe quelle réplique.

L’impeccable interprétation de l’ensemble du casting est d’ailleurs une des pièces maîtresses de la réussite de ce film. Entre la justesse de Darin qui joue le personnage principal, l’impassibilité de Javier Godino qui campe un prédateur redoutable et le jeu tout en retenue de Pablo Rago, en veuf meurtri, certaines confrontations entre ces protagonistes ne manquent pas d’intensité !

Après « El nino pez », « La Sangre Brota » et plus récemment « Padre Nuestro », le cinéma argentin confirme une fois de plus toute sa maitrise dans les films noirs grâce à cette œuvre. Et une fois n’est pas coutume, gageons que celle-ci sera largement reconnue.

Alexandre RomanazziEnvoyer un message au rédacteur

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